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AUTOUR D’UNE AUBERGE

viendras au moulin qui s’achève, et nous en jaserons. »

C’est ce qui eut lieu en effet. Jules Rougeaud fut meunier : bien plus, il devint l’homme de confiance de Sellier qui le chargea du soin de surveiller la construction d’un moulin à scie où les colons trouvèrent plus tard un emploi rémunérateur.

Ces deux moulins furent avantageux aux habitants de la paroisse qui doubla sa population. Pour sa part, Sellier fit venir de son pays une douzaine de familles françaises, dont il employa les chefs à son service. Cette nouvelle recrue, tout en augmentant la population, ne fut pas à l’avantage de Notre-Dame, sous le rapport moral et religieux. Les membres de ces familles, élevés dans l’indifférence religieuse, comprenaient peu de choses aux beautés de notre foi. Plusieurs n’avaient même pas encore été baptisés. Les bons Canadiens, si accoutumés à voir dans le prêtre le représentant de Dieu, furent souvent scandalisés des propos que ces nouveaux venus tenaient sur le compte des curés. Ils ne comprenaient rien à de tels discours. Plus d’une fois des bagarres éclatèrent sans que Sellier, qui, naturellement, devait connaître ces faits, intervînt le moins du monde.

M. Héroux, jusque-là si heureux au milieu de ses braves colons, comprit vite que l’heure de l’épreuve venait de sonner. Dans ses sermons, il tâchait de remédier au mal que causait à son troupeau fidèle l’arrivée