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THUCYDIDE, LIV. I.

que la place n’était pas enlevée de vive force, craignirent le génie audacieux des Athéniens et leur caractère remuant. Ne les regardant pas d’ailleurs comme un peuple de leur race, ils appréhendaient que, pendant leur séjour devant Ithôme, ils ne se laissassent gagner par ceux qui s’y étaient renfermés, et ne causassent quelque révolution. Ce furent les seuls des alliés qu’ils renvoyèrent, sans manifester cependant de soupçons, mais sous prétexte qu’ils n’avaient plus besoin de leurs secours. Les Athéniens comprirent bien qu’on les congédiait sans leur dire le vrai mot, et qu’il était survenu quelque défiance. Indignés de l’affront, et ne se croyant pas faits pour être ainsi traités par les Lacédémoniens, à peine retirés, ils abjurèrent l’alliance qu’ils avaient contractée avec eux dans la guerre médique, et se déclarèrent pour les Argiens, ennemis de Lacédémone. En même temps ces deux nouveaux alliés s’unirent par les mêmes sermens avec les Thessaliens.

Chap. 103. Enfin, après dix ans, ceux d’Ithôme, ne pouvant résister, capitulèrent avec les Lacédémoniens. Il fut convenu qu’ils sortiraient du Péloponnèse sous la foi publique, et n’y rentreraient jamais, sous peine, pour celui qui serait pris, d’être esclave de qui l’aurait arrêté. Les Lacédémoniens avaient reçu auparavant de Pytho un oracle qui leur ordonnait de laisser partir les supplians de Jupiter Ithômétas. Ceux-ci sortirent donc avec leurs femmes et leurs enfans. Les Athéniens s’empressèrent de les recevoir, en haine de Lacédémone, et les envoyèrent en colonie à Naupacte, qu’ils se trouvaient avoir pris récemment sur les Locriens Ozoles.

Les Mégariens recoururent aussi à l’alliance d’Athènes. Ils se détachaient de Lacédémone parce que Corinthe leur faisait la guerre pour les limites réciproques. Ainsi les Athéniens acquirent Mégares et Pèges. Ce furent eux qui construisirent aux Mégariens les longues murailles qui vont de leur ville jusqu’à Nisée, et ils y mirent garnison. De cette époque surtout commença la haine envenimée de Corinthe contre Athènes.

Chap. 104. Cependant Inarus, fils de Psammétique, et roi des Lybiens qui touchent à l’Égypte, partit de Marée, cité au-dessus du Phare, fit soulever une grande partie de l’Égypte contre le roi Artaxerxès ; et nommé lui-même chef des rebelles, il appela les Athéniens. Ils étaient à Cypre avec deux cents vaisseaux, tant d’Athènes que des alliés. Ils abandonnèrent Cypre pour se rendre à l’invitation d’Inarus, entrèrent de la mer dans le Nil, le remontèrent, se rendirent maîtres de ce fleuve et de deux quartiers de Memphis, et assiégèrent le troisième, qui se nomme Mur-Blanc. Là s’étaient réfugiés les Perses, les Mèdes, et ceux des Égyptiens qui n’avaient point part à la rébellion.

Chap. 105. D’un autre côté, les Athéniens firent une descente à Halies et livrèrent bataille aux Corinthiens et aux Épidauriens. Les Corinthiens remportèrent la victoire. Les Athéniens vainquirent à leur tour, près de la Cécryphalie, dans un combat naval contre les Péloponnésiens.

Une guerre survint ensuite entre les Éginètes et les Athéniens. Un grand combat naval fut livré près d’Égine : chacun des deux partis était secondé par ses alliés. Les Athéniens eurent l’avantage ; ils prirent-soixante-dix vaisseaux sur les ennemis, descendirent à terre, et formèrent le siége de la ville, sous le commandement de Léocrate, fils de Strœbus. Les Péloponnésiens voulurent secourir les Éginètes, et portèrent à Égine trois cents hoplites, qui avaient

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