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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/199

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THUCYDIDE, LIV. III.

vous défendez ceux qu’il faut défendre, et que vous punissez vos ennemis. L’occasion s’offre plus belle que jamais. Les Athéniens sont épuisés et par une maladie contagieuse et par des dépenses excessives. Leur flotte est employée en partie contre votre pays, en partie contre nous. On peut donc croire qu’il leur restera peu de vaisseaux à vous opposer, si cet été même, réunissant vos forces de terre et de mer, vous faites une seconde irruption dans l’Attique. Vous les verrez ou hors d’état de se défendre contre nous, ou même forcés de se retirer à-la-fois et du Péloponnèse et de Lesbos.

» Et que personne de vous ne croie s’exposer à des périls domestiques pour défendre une terre étrangère. Tel juge Lesbos éloignée, qui retirera de son alliance des avantages qui le toucheront de très près. Car la guerre ne se fera pas dans l’Attique, comme on pourrait se l’imaginer ; mais dans un pays fécond en ressources pour l’Attique. Or, c’est de ses alliés qu’Athènes tire ses revenus ; revenus qu’elle augmentera, si elle parvient à nous soumettre. Dès-lors, plus d’alliés qui osent se détacher d’elle. Le tribut qu’elle nous imposera accroîtra sa richesse, et nous aurons alors à souffrir plus que ceux qu’elle a d’abord soumis. Mais si vous nous secourez avec zèle, vous ajouterez à vos propres forces celles d’une république qui possède une grande marine, ressource dont vous avez grand besoin ; et vous détruirez plus aisément la puissance d’Athènes en lui enlevant ses alliés ; car chacun d’eux se jettera avec plus de confiance dans vos bras. Vous vous justifierez en même temps du reproche qu’on vous fait de ne point secourir ceux qui abandonnent leur parti pour le vôtre. Devenez leurs libérateurs, et vous verrez se concentrer chez vous les forces de la guerre.

Chap. 14. » Au nom de l’Hellade, qui a mis en vous toutes ses espérances, par Jupiter Olympien, dans l’hiéron de qui nous paraissons en supplians, devenez alliés des Mityléniens. Armez-vous pour leur défense, et ne nous abandonnez pas, nous qui, en défendant une cause qui nous est personnelle, offrons à tous, en cas de succès, un avantage commun, et qui causons à tous un dommage général, si nous devons succomber pour n’avoir pu vous persuader. Soyez tels enfin que les Hellènes vous supposent, et que nos craintes nous font désirer que vous soyez. »

Chap. 15. Voilà ce que dirent les Mityléniens. Les Lacédémoniens et les alliés, après les avoir entendus, goûtèrent leurs raisons, et reçurent les Lesbiens dans leur alliance. Résolus d’entrer dans l’Attique, ils engagèrent les alliés qui étaient présens à se rendre dans l’isthme le plus tôt possible, avec les deux tiers de leur forces. Eux-mêmes y arrivèrent les premiers ; et voulant que leur invasion eût lieu à-la-fois par terre et par mer, ils préparèrent dans l’isthme les traîneaux qui devaient servir à transporter les vaisseaux de Corinthe à la mer d’Athènes. Ils firent ces dispositions avec célérité ; mais les autres alliés se rassemblèrent lentement, occupés de leurs moissons, et d’ailleurs fatigués de la guerre.

Chap. 16. Les Athéniens, sachant que c’était par mépris pour leur faiblesse qu’on se préparait à les attaquer, voulurent montrer qu’on avait mal jugé, et que, sans toucher à leur flotte de Lesbos, ils pouvaient se défendre aisément contre celle qui venait du Péloponnèse. Ils équipèrent cent vaisseaux, qu’ils montèrent eux-mêmes, tant citoyens que métèques, excepté les chevaliers et ceux qui avaient cinq cents médimnes de revenu. Ils côtoyèrent l’isthme, faisant