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plaine qui l’entoure, on trouve un chemin, ou plutôt une chaussée qui n’a que sept à huit pieds de large. Ce point est à remarquer. Les Phocéens y construisirent autrefois un mur pour se garantir des incursions des Thessaliens. Ce mur, qui avait des portes que les Grecs appellent pylas, et le courant d’eaux chaudes, ont fait donner à ce lieu le nom de Thermopyles[1].

Après avoir passé le Phœnix dont les eaux finissent par se mêler avec celles de l’Asopus, qui sort d’une vallée voisine, on rencontre un dernier défilé ; sa largeur est d’un demi-plethre (sept à huit toises). La voie s’élargit ensuite jusqu’à la Trachinie, qui tire son nom de la ville de Trachis. Ce pays présente de grandes plaines arrosées par le Sperchius et par d’autres rivières. Tout le détroit, depuis le défilé placé en avant d’Alpénus jusqu’à celui qui est au-delà du Phœnix, peut avoir quarante-huit stades de long (environ deux lieues). Sa largeur varie presque à chaque pas ; mais partout on a d’un côté, des montagnes escarpées, et de l’autre la mer, ou des marais impénétrables. Le chemin est souvent détruit, ou par des eaux stagnantes, ou par des torrens.

En apprenant le choix de la diète, Léonidas prit pour l’accompagner trois cents Spartiates ; les Thébains lui donnèrent quatre cents hommes ; bientôt son détachement se grossit successivement. Mille soldats de Tégée et de Mantinée arrivèrent, cent vingt d’Orchomène, mille des autres villes d’Arcadie, quatre cents de Corinthe, deux cents de Phlionte, quatre-vingts de Mycènes, sept cents de Thespies, mille de la Phocide, enfin la petite nation des Locriens se rendit au camp avec toutes ses forces.

D’après la description du détroit des Thermopyles, il ne devait pas être difficile à sept mille combattans d’y arrêter une armée très nombreuse, puisqu’elle ne pouvait approcher des Grecs que par des défilés, où trois hommes de front passaient à peine. Mais s’il était bien de profiter de cette fortification naturelle, il fallait au moins la garder avec précaution, les surprises étant le premier élément de succès à la guerre.

Ni Léonidas, ni les Grecs qui allèrent aux Thermopyles n’en connaissaient le chemin, suivant Hérodote ; ce furent les Trachiniens qui les y conduisirent ; et l’on voit que Léonidas, au lieu d’examiner les lieux qu’il fallait fermer, se contente de faire relever l’ancienne muraille que te temps avait détruite, et de poster mille Phocéens sur les hauteurs du mont Œta, afin d’observer un sentier qui commençait à la plaine de Trachis, et qui après différens détours, aboutissait par la montagne auprès d’Alpénus. Pour lui, il se plaça avec six mille hommes contre Anthéla, et mit quelques troupes en avant du mur qu’il avait fait rétablir.

Si Léonidas, au lieu de s’en rapporter aux indications étrangères, avait fait une reconnaissance dans la montagne, il aurait vu que le sentier qui la traversait était aussi important à défendre que le pas des Thermopyles ; rien n’était plus facile que de fortifier ce nouveau poste ; ses sept mille hommes lui permettaient de le défendre avec avantage ; et il pouvait aussi bien arrêter l’armée de Xerxès sur ce point, qu’il le fit auprès d’Anthéla.

Remarquons encore que le temps ne manquait point pour prendre ces précautions vulgaires qu’un général ne doit négliger dans aucun cas ; qu’ici les Grecs ne pouvaient être inquiétés par les Perses ; et que ce fut long-temps après leur arrivée aux Thermopyles que Xerxès fit marcher ses troupes et donner l’assaut.

Les Mèdes et les Cissiens se présentè-

  1. Voyez l’ATLAS.