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THUCYDIDE, LIV. V.

favorable, les Corinthiens et les députés de l’Épithrace se retirèrent sans avoir rien terminé. Les béotarques, qui, s’ils avaient réussi auprès des conseils, auraient essayé de faire conclure une alliance avec Argos, ne firent à ces conseils aucun rapport sur les Argiens, et ne tinrent pas la promesse qu’ils avaient faite d’envoyer des députés à Argos. Ainsi tout fut négligé et différé.

Chap. 39. Le même hiver, les Olynthiens firent une irruption sur Mécyberné [havre qui leur appartenait et dont s’étaient emparés les Athéniens], et la prirent d’emblée. Il subsistait toujours des négociations entre Athènes et Lacédémone, au sujet des villes qu’ils se retenaient réciproquement. Les Lacédémoniens, à la suite de cet événement, espérant que, si les Athéniens recevaient Panactum des mains des Béotiens, eux-mêmes recouvreraient Pylos, envoyèrent des députés aux Béotiens, et demandèrent, pour parvenir à l’échange, qu’on leur remît Panactum et les prisonniers d’Athènes. Mais les Béotiens répondirent qu’ils ne les rendraient pas que Lacédémone n’eût conclu avec eux une alliance particulière, comme elle l’avait fait avec Athènes. Les Lacédémoniens n’ignoraient pas qu’ils offenseraient cette république, puisqu’on était convenu de part et d’autre de ne faire que d’un commun accord la guerre ou la paix ; mais, comme ils voulaient recevoir Panactum pour l’échange contre Pylos, et que d’ailleurs ceux qui s’appliquaient à troubler la trève, avaient à cœur de traiter avec les Béotiens, ils conclurent l’alliance sur la fin de cet hiver, aux approches du printemps. Aussitôt Panactum fut détruit.

Là se termina la onzième année de la guerre.

Chap. 40. L’été suivant, dès le commencement du printemps, les Argiens, ne voyant pas arriver les députés de Béotie qu’on avait promis d’envoyer, et sachant que Panactum était rasé, et que les Béotiens avaient fait une alliance particulière avec les Lacédémoniens, craignirent de se trouver isolés, et que tous les alliés ne se tournassent vers Lacédémone. Ils croyaient que c’était à la sollicitation de cette république que les Béotiens avaient demandé Panactum et fait alliance avec Athènes, et que les Athéniens avaient connaissance de toutes ces mesures. Ils pensaient ne pouvoir plus eux-mêmes, quoiqu’il l’eussent d’abord espéré, s’allier avec eux dans le cas où, par suite de nouveaux différends, le traité de Lacédémone viendrait à se rompre. Ils se trouvaient à cet égard pris au dépourvu et craignaient d’avoir en même temps la guerre avec les Lacédémoniens, les Tégéates, les Béotiens et les Athéniens, eux qui, loin d’accepter le traité des Lacédémoniens, avaient nourri dans leurs cœurs l’espoir de commander au Péloponnèse. Ils envoyèrent, le plus tôt possible, en députation à Lacédémone, Eustrophus et Éson, qu’ils croyaient y être le plus en faveur : ils espéraient, en faisant avec cette république le meilleur traité que permettraient les circonstances, assurer leur tranquillité, quelque tournure que dussent prendre les affaires.

Chap. 41. Les députés eurent, à leur arrivée, des conférences avec les Lacédémoniens, sur les conditions auxquelles ils pourraient traiter. Les Argiens demandèrent d’abord que leurs éternels débats au sujet de la Cynurie, contrée limitrophe, fussent remis à l’arbitrage ou d’une ville ou d’un particulier. Ce pays, qui renferme les villes de Tyrée et d’Anthène, est occupé par des Lacédémoniens. Ceux-ci ne consentaient pas à revenir sur cette affaire ; mais ils se montraient disposés, si les Argiens le

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