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ARRIEN, LIV. II.

gne : ainsi l’aile droite se divisait elle-même en deux parties, dont l’une était opposée à Darius, placé au-delà du fleuve avec le gros de son armée, et l’autre regardait l’ennemi qui les tournait sur les hauteurs. À l’aile gauche, en avant de l’infanterie, marchent les archers Crétois et les Thraces, commandés par Sitalcès, précédés de la cavalerie et des étrangers soldés qui forment l’avant-garde.

Comme la phalange à l’aile droite avait moins de front que la gauche des Perses dont elle pouvait être cernée facilement, Alexandre la renforce, en dérobant leur mouvement à l’ennemi, par deux compagnies d’Hétaires, sous la conduite de Péridas et de Pantordanus ; et comme ceux de l’ennemi, postés sur les flancs de la montagne, ne descendaient point, Alexandre, les ayant repoussé sur les sommets, avec un détachement d’Agriens et d’Archers, se contente de leur opposer trois cents chevaux, fait passer sur le front de l’aile droite le reste des troupes placées de ce côté, y joint les Grecs à sa solde, et donne alors, à cette partie de son armée, un développement plus étendu que celui des Perses qu’elle avait à combattre.

L’ordre de bataille ainsi disposé, Alexandre s’avance lentement, et en faisant des haltes fréquentes, comme s’il ne voulait rien précipiter.

De son côté Darius ne quitte point les bords escarpés du fleuve où il était placé ; il a même défendu par des palissades les rives d’un facile accès : cette disposition révèle aux Macédoniens que Darius a déjà présagé sa défaite.

Les armées en présence, Alexandre, à cheval, parcourt ses rangs, encourage les siens, appelle nominativement et avec éloge non-seulement les principaux chefs, mais encore les Ilarques, les moindres officiers, et ceux mêmes des étrangers distingués par leurs grades ou leurs exploits : tous par un cri unanime, demandent à fondre sur l’ennemi.

Alexandre continue de s’avancer lentement, de peur qu’une marche trop rapide ne jette du désordre dans sa phalange ; mais parvenu à la portée du trait, les premiers qui l’entourent, et lui-même à la tête de l’aile droite courent à toutes brides vers le fleuve pour effrayer les Perses par l’impétuosité du choc, en venir plutôt aux mains, et se garantir ainsi de leurs flèches. Alexandre n’est point trompé dans son attente. Au premier choc, la gauche de l’ennemi cède, et laisse aux Macédoniens une victoire aussi éclatante qu’assurée.

Dans le mouvement précipité et décisif d’Alexandre, la pointe de la phalange avait suivi l’aile droite, tandis que le centre n’avait pu marcher avec la même promptitude ni maintenir son front et ses rangs, arrêté par la barrière que présentaient les bords escarpés du fleuve : les Grecs, à la solde de Darius, saisissent le moment et tombent avec impétuosité sur la phalange macédonienne ouverte. Le combat devient opiniâtre ; les Perses s’efforcent de rejeter les Macédoniens dans le fleuve et de reprendre l’avantage pour ceux qui fuyaient ; et les Macédoniens s’obstinent à maintenir celui d’Alexandre, et l’honneur de la phalange jusque-là réputée invincible. La rivalité des Grecs et des Macédoniens redouble l’acharnement. Ptolémée, après des prodiges de valeur, et cent vingt Macédoniens de distinction, sont tués.

Cependant l’aile droite d’Alexandre, après avoir renversé tout ce qui était devant elle, tourne sur les Grecs à la solde de Darius, les écarte du bord, et, enveloppant leurs rangs découverts et

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