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ARRIEN, LIV. III.

troupes. Il y eut entre les Grecs et les Barbares un combat sanglant. L’ennemi ne lâcha pied que quand Satibarzanes, aux prises avec Érigyus, tomba renversé d’un coup de lance dans le visage ; mais alors la déroute des Barbares fut complète.

Cependant Alexandre arrivé au pied du Caucase, y bâtit une ville qui porte son nom ; sacrifie à la manière accoutumée, et franchit les sommets de cette montagne. Il nomme le persan Proexès satrape de la contrée, sous la surveillance de Niloxenus qu’il y laisse avec des troupes.

Le Caucase est, au rapport d’Aristobule, la montagne la plus élevée de l’Asie. En effet, il s’étend dans une longueur immense, et l’on regarde comme en faisant partie cette longue chaîne de montagnes dont le nom varie avec celui des nations qui les habitent, et qui se prolonge jusqu’au Taurus, frontière de la Cilicie et de la Pamphilie ; sa cime paraissait à l’ordinaire aride et dépouillée ; il ne croît sur cette partie éloignée du Caucase que le térébinthe et le silphium. Il ne laisse cependant pas d’être habité, et couvert de nombreux troupeaux qui se nourrissent de ces plantes, attirés par l’odeur du silphium dont ils broutent la fleur et la tige jusque dans ses racines. Voilà pourquoi les Cyréniens, auxquels il est précieux, l’environnent de haies pour le soustraire à la dent des troupeaux qu’ils en écartent.

Chap. 10. Bessus, soutenu des Perses de sa faction, d’environ sept mille Bactrianes et des Dahes qui habitent en-deçà du Tanaïs, ravage tout le pays au-dessous du Caucase pour arrêter, par le défaut de subsistances, le vainqueur dont il apprend la marche.

Alexandre, malgré la hauteur des neiges et la difficulté des convois, poursuit sa route. Bessus pressé, traverse l’Oxus, brûle ses bâtimens de transport, et se retire à Nantaque, dans la Sogdiane, suivi des Dahes, de la cavalerie Sogdiane, sous la conduite de Spitamène et d’Oxyarte. Les cavaliers Bactriens abandonnent Bessus au moment où ils le voient chercher son salut dans la fuite.

Alexandre, après avoir fait rafraîchir son armée à Drapsaque, prend le chemin de Bactres et d’Aorne, villes principales de la Bactriane, les emporte du premier assaut, jette une garnison dans Aorne, commandée par Archélaüs l’un des Hétaires.

Le reste de la Bactriane cède bientôt ; le persan Artabaze en obtient le gouvernement.

On s’avance vers l’Oxus. Ce fleuve prend sa source dans le Caucase ; c’est le plus considérable qu’Alexandre ait eu à traverser dans l’Asie, après ceux des Indes les plus grands des fleuves connus : il se jette dans la mer Caspienne, près de l’Hyrcanie.

Nul moyen de le traverser alors : sa largeur est de six stades ; son lit est encore plus profond et plein de sable ; son cours extrêmement rapide ; il est également difficile d’y fixer ou d’y retenir des pilotis. On manquait de bois pour y jeter des ponts : tirer de plus loin ces matériaux, les rassembler aurait perdu un temps précieux ; on a recours à l’expédient suivant. On remplit de paille et de sarmens secs les peaux qui formaient les tentes des soldats, on les coud de manière à les rendre imperméables, on les attache entre elles, on s’aide de ce moyen, et l’armée traverse le fleuve en cinq jours.

Avant de le passer il renvoya les Thessaliens qui restaient, et les Macédoniens que l’âge ou leurs blessures rendaient inhabiles au combat. Stazanor, l’un des Hétaires, est nommé sa-