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ARRIEN, LIV. III.

tas contre la vie du roi. Ptolémée et Aristobule rapportent qu’Alexandre en avait été instruit dès son séjour en Égypte, mais qu’il avait refusé d’y croire, plein de confiance dans le fils, d’estime et d’amitié pour le père. Ptolémée ajoute que le criminel fut amené devant les Macédoniens ; qu’Alexandre l’accusa devant l’assemblée générale ; que Philotas se justifia d’abord ; que les témoins parurent ensuite, et le convainquirent d’avoir été instruit des embûches dressées à Alexandre sans les lui avoir révélées, quoiqu’il entrât deux fois par jour dans sa tente. Philotas et ses complices périrent percés de traits par les Macédoniens.

Polydamas, l’un des Hétaires, fut chargé de lettres pour les chefs qui commandaient dans la Médie, savoir : Cléandre, Sitalcès et Ménidès, placés sous les ordres de Parménion qu’ils tuèrent. Alexandre supposait-il la complicité de Parménion avec son fils, ou craignait-il sa vengeance après la mort de Philotas ? Parménion jouissait de la plus grande autorité, non seulement auprès d’Alexandre, mais encore auprès de toute l’armée où il avait maintes fois exercé le commandement général ou particulier avec la plus grande distinction.

On mit aussi en jugement, sous prétexte de complicité, à cause de l’amitié qu’ils portaient à Philotas, Amyntas et ses trois frères, Polémon, Attale et Simmias. La désertion de Polémon, à la nouvelle de l’emprisonnement d’Amyntas, semblait donner du poids à l’accusation ; mais Amyntas s’étant lavé complètement, ainsi que ses frères, dans sa défense devant l’assemblée, fut absous généralement, et ne profita de sa liberté que pour retirer son frère de chez l’ennemi, après en avoir obtenu la permission de ses juges. Il acheva de se justifier en ramenant Polémon le même jour : mais il périt peu de temps après percé d’un trait à l’attaque d’une place, laissant du moins une mémoire sans reproche.

Alexandre divise le commandement de la cavalerie ; sa politique redoutait de confier, même à un seul de ses amis, le principal corps et le plus belliqueux de l’armée ; il donna la première de ces divisions à Éphestion et la seconde à Clitus.

Il arrive à la contrée des Agriaspes Évergètes qui avaient secouru Cyrus, le fils de Cambyse, dans son expédition contre les Scythes. Alexandre les traita avec distinction en mémoire de la conduite de leurs aïeux, et par égard pour leurs institutions. En effet, ces peuples ne vivent point comme les Barbares, mais à l’exemple des Grecs civilisés, ils connaissent la justice. Il leur accorde la liberté et le territoire qu’ils voudraient lui demander : ils n’en choisirent qu’un de peu d’étendue.

Le prince sacrifie à Apollon, et fait arrêter Démétrius, l’un de ses gardes, soupçonné d’avoir trempé dans la conjuration de Philotas. Ptolémée est nommé à sa place.

Alexandre marche sur Bessus dans la Bactriane ; soumet en passant les Dragogues et les Drangues, ainsi que les Arachotes auxquels ils laisse Memnon pour satrape. Il subjugue les Indiens finitimes, malgré les neiges, le manque de provisions et les fatigues multipliées de ses soldats. Apprenant la nouvelle défection des Arriens par les manœuvres de Satibarzanes, qui était entré sur leur territoire avec deux mille chevaux que Bessus lui avait envoyés, Alexandre détache contre eux le persan Artabaze, les Hétaires, Érigyus et Caranus, avec ordre à Phratapherne, satrape des Parthes, de se joindre à ces