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prince ne cessa donc de favoriser la cause d’Annibal. Mais continuellement traversé par les guerres de ses voisins, rebuté d’ailleurs par la mauvaise conduite du sénat de Carthage, Philippe ne tenta que de faibles efforts.

C’était assez cependant pour donner un prétexte de faire éclater les desseins de Rome contre la Grèce ; aussi trois mois s’écoulaient à peine depuis la paix, qu’ils cherchèrent querelle au roi de Macédoine, à l’occasion d’un démêlé dans lequel il se trouvait engagé avec les Athéniens.

Comme ce prince avait prévu la guerre, les moyens pour la faire ne lui manquèrent pas ; et bien que les autres peuples Grecs eussent l’imprudence de se joindre aux Romains, et de conspirer ainsi contre leur propre existence, Philippe soutint une guerre de trois années, reparaissant chaque fois en campagne avec une bonne armée qu’il exerçait pendant l’hiver.

La fortune ne seconda pas ses espérances ; il fut contraint de demander la paix. Les Romains ne le croyant pas assez humilié pour la recevoir telle qu’ils voulaient la lui donner, refusèrent ses propositions ; et Philippe songea dès lors à tenter encore la voie des armes.

Mais il fallait faire un effort extraordinaire, et son pays était épuisé. Il enrôla de vieux soldats hors du service, reçut même dans son armée tout ce qu’il put trouver de jeunes-gens qui n’en avaient pas encore atteint l’âge, et parvint à réunir seize mille hoplites et deux mille peltastes, auxquels il ajouta deux mille Thraces et Illyriens, mille étrangers qu’il entretenait à sa solde, et deux mille hommes de cavalerie. Avec cette armée, Philippe espéra tenir tête à Q. Flaminius qui avait passé ses quartiers d’hiver en Grèce, aux environs d’Élatéa.

Dès que le proconsul eut avis que Philippe entrait en campagne, il assembla promptement ses troupes, et résolut de marcher contre lui. Il comptait dans son armée deux légions dont les soldats, tous hommes d’élite, avaient servi dans les guerres d’Italie et d’Afrique ; dix mille Grecs presque tous armés à la légère, et une très bonne cavalerie, supérieure en nombre à celle du roi.

Q. Flaminius passa les Thermopyles qui donnent entrée dans la Thessalie, et de là, marcha vers Thèbes où il avait des intelligences ; mais l’entreprise manqua, et la garnison ayant fait une vigoureuse sortie contre son avant-garde qui s’était trop avancée, Q. Flaminius fut sur le point d’être pris. Il pénétra cependant jusqu’au cœur de la province, et vint camper à six mille de Pheræ.

Philippe, qui avait passé aussi en Thessalie par le mont Olympe, apprit que les Romains s’étaient portés sur Thèbes, et qu’ils poussaient en avant. Il alla droit à leur rencontre, et plaça son camp à quatre mille de Pheræ ; de sorte que cette ville et les montagnes dont elle était environnée, séparèrent les deux armées, sans que ni l’une ni l’autre ne connût au juste la position respective de son adversaire.

Les deux chefs, dirigés par le même esprit, s’étaient approchés de ces montagnes dans le dessein de les passer ; et le lendemain, avant le lever du soleil, ils envoyèrent des reconnaissances. Les détachemens qui se croyaient loin de l’ennemi, s’aperçurent et durent être bien surpris de la rencontre ; ils envoyèrent de part et d’autre, pour donner avis de leur position.

Le roi de Macédoine rappela ses éclaireurs et résolut de lever le camp, la guerre des montagnes n’étant pas de son goût, et devenant peu propre aux