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engage à rester unis pour repousser avec plus de succès l’ennemi commun. Il emploie la douceur, l’éloquence la plus persuasive, et finit par leur demander un corps de cavalerie. Ces troupes peuvent lui rendre de grands services, et répondent de la fidélité qu’on lui jure.

Les Germains en général méprisaient les Gaulois. Ceux qui firent cette incursion ne comptaient pas rencontrer une opposition formidable. Ils avaient divisé leurs forces, et envoyèrent leur cavalerie au-delà de la Meuse pour balayer les parties basses du pays et se procurer des vivres.

Les députés, surpris de la réponse de César, demandèrent une trève de trois jours, afin de rendre compte de leur mission. César, craignant qu’ils ne cherchassent à l’amuser pour gagner du temps et réunir leurs forces, refusa cette proposition et poursuivit sa marche.

Arrivé à douze milles de leur camp, il rencontra de nouveau les députés qui le prièrent de ne pas s’avancer plus loin, ou du moins d’interdire les hostilités pendant trois jours à la cavalerie qui formait l’avant-garde de son armée ; ils ajoutèrent que durant cet intervalle ils recevraient une réponse, et sauraient si la ligne proposée par les Romains était praticable, s’il n’y avait pas danger pour eux à repasser le Rhin.

On doit croire que César accorda la suspension d’armes qu’on lui demandait. Il dit aux députés qu’il avait besoin d’eau, et se voyait obligé de faire encore quatre milles ; mais il promit de ne pas s’avancer plus loin et de faire prévenir son avant-garde.

Ou cet ordre fut sans effet, ou bien il ne parvint pas à ces troupes. L’avant-garde composée de cinq mille cavaliers gaulois livra un combat à huit cents hommes ; car le gros corps de cavalerie des Usipètes et des Tenchthères n’était pas arrivé. Il y eut de singulier dans cette affaire que les cinq mille cavaliers furent complètement battus.

Les chefs des Germains qui se croyaient en sûreté sortirent de leur camp, se rendirent en foule à celui de César pour protester de leurs intentions pacifiques, et se justifier d’une méprise qu’ils rejetaient sur les troupes gauloises. Ce fut un malheur pour eux de s’être confiés à la sauvegarde de César.

Et soit qu’il eut résolu de punir un acte de trahison par une trahison semblable, soit que ces barbares dont il ne pouvait méconnaître la bravoure lui offrissent en effet une trop belle occasion de terminer la guerre d’un seul coup ; César, après avoir fait arrêter tous ces chefs, forme son armée sur trois colonnes, place la cavalerie qu’il croyait encore effrayée à la queue de son infanterie, et parcourant avec rapidité le terrain qui le séparait de ses adversaires, tombe à l’improviste sur leur camp.

Cette apparition subite devait occasionner un effroyable désordre parmi cette multitude privée de ses chefs, et s’offrant pour ainsi dire sans aucun moyen de défense. Ceux qui eurent le temps de courir aux armes, firent quelque résistance ; les autres, poursuivis jusqu’au confluent de la Meuse et du Rhin, périrent par le fer ou dans les eaux. Ce massacre ne coûta pas un soldat à César, qui put exterminer entièrement un peuple dont le nombre s’élevait à quatre cent trente-trois mille individus.

La cavalerie des Germains ne fut point comprise dans le massacre, et ce fut un prétexte pour César d’aller la chercher au-delà du Rhin. Il passa le fleuve, non sur des barques et par sur-

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