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toutes les autres ; ce fut la sûreté de Scipion. Elle exigeait la présence de Pompée en Macédoine. En retirant son armée, il le sacrifiait avec les troupes nouvellement arrivées d’Asie.

Tels furent les motifs qui engagèrent les deux généraux à marcher en Thessalie, où ils avaient différens corps de leur armée qu’il fallait sauver. Ils calculèrent leurs mouvements respectifs manière à soutenir leurs divisions, et empêcher celles de l’ennemi de les rejoindre.

La marche de César vers Apollonie l’avait écarté de sa route ; et comme il avait l’air de fuir après une défaite, cette idée lui nuisait beaucoup dans le pays qu’il traversait. On avait arrêté les porteurs de ses dépêches pour Cn. Domitius Calvinus, qu’il ne faut pas confondre avec L. Domitius Ænobarbus, tenant pour le parti de Pompée. Tandis que les deux armées s’avançaient, Cn. Domitius avait fait quelques mouvemens en Macédoine pour se procurer des vivres, et, s’étant trouvé sur la route de Pompée avec les deux légions qu’il commandait, eut peine à lui échapper.

Arrivé assez heureusement pour sauver Cn. Domitius, César le joignit au passage des montagnes qui séparent la Macédoine de la Thessalie, et continua de marcher vers Gomphi. Cette place ne voulut point le recevoir : il escalada les murs, livra la ville au pillage, et, afin d’en faire un exemple de terreur pour celles qui oseraient retarder sa marche, fit passer tous les habitans au fil de l’épée. Métropolis, épouvantée par le sort de Gomphi, lui ouvrit ses portes dès qu’il parut.

De là jusqu’à Larisse, où Scipion, qui était redescendu le long de l’Haliacmon, avait amené une armée considérable, le pays se présentait ouvert, et l’on reçut partout sans difficulté César et ses détachemens. Après avoir passé les petites rivières qui se jettent dans le Pénée, il se posta sur les bords de l’Énipée, qui arrose le district de Pharsale.

Ici, César dominait sur de vastes plaines chargées de fourrage et de moissons mûrissantes ; une contrée fertile s’étendait au loin derrière lui, et, ses forces venaient de s’accroître non-seulement par la jonction de Cn. Domitius, mais probablement encore par la légion que Longinus commandait en Italie. César se trouvait avec une armée de dix légions, en état de renouveler ses opérations offensives.

Pompée dirigea ses vues vers le même quartier ; mais il n’y était point encore arrivé, quoique sa marche fût plus directe et que la dernière action l’eût fait accueillir favorablement sur tous les lieux qu’il avait à traverser. Il fut joint par Scipion, qui de Larisse vint à sa rencontre, et ils prirent ensemble leur poste sur une hauteur voisine de Pharsale, en face de celui de l’ennemi, à la distance de trente stades.

Malgré toutes les démonstrations de César, les deux généraux s’étant établis assez longtemps dans cette position pour épuiser tout ce que les plaines des environs avaient pu produire de blé et de fourrage, César prit la résolution de quitter son poste et d’en chercher un autre plus favorable.

Il espérait aussi fatiguer son ennemi par des marches continuelles, et le contraindre à recevoir enfin cette bataille offerte inutilement depuis son arrivée. Le jour fixe pour son départ était venu ; on pliait les tentes ; déjà même l’avant-garde défilait par la porte décumane ; César crut remarquer que les légions de son adversaire, qui toujours se ran-