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plateau du Garden, à quatre cents toises de Lérida, se contente de faire sortir ses troupes, et s’arrête à mi-côté, au-dessous de son camp. César prend la résolution de s’établir à environ trois cents toises du pied du plateau ; et, afin que les travailleurs ne soient pas effrayés par une attaque soudaine, il fait seulement creuser un fossé par sa troisième ligne ; mais il défend d’en couronner le rempart avec la palissade que son élévation eût fait apercevoir. La première et la seconde ligne continuent de rester sous les armes, et le fossé est achevé avant qu’Afranius se doute qu’on s’occupe de se retrancher. César alors fit rentrer ses légions en deçà du fossé, et les tint toute la nuit sous les armes. Le lendemain, trois légions sont chargées de terminer l’enceinte, et les trois autres, couvertes par le retranchement de la veille, doivent protéger les travailleurs. Afranius rangea ses troupes au pied de la colline, et voulut simuler une attaque ; César, rassuré par le fossé qui couvrait ses légions en bataille, ne suspendit pas ses travaux.

L’espace de deux cents pieds que les Romains laissaient entre les tentes et les retranchemens, servait à faire défiler les troupes à leur entrée et à leur sortie. Au premier signal du départ, on ployait les tentes en commençant par celles des tribuns ; au second signal on chargeait les bagages. Après avoir donné le temps nécessaire à cette opération, on faisait demander à haute voix aux soldats si tout était prêt, et ceux-ci répondaient par un cri. Alors on donnait le troisième signal, et toute l’armée se mettait en marche.

Comme les plus fortes machines des anciens ne portaient pas beaucoup au-delà de trois cents toises, les camps s’établissaient très près les uns des autres, et c’était une raison indispensable pour se couvrir et se mettre à l’abri d’un coup de main. Il était peu important qu’une place ou qu’un camp fussent dominés, hors de la portée de ces machines, et il devenait inutile de placer une chaîne de postes avancés. On faisait la garde en dedans, le long du rempart et aux portes. Cette fonction regardait particulièrement les vélites qui fournissaient aussi des gardes au-delà du fossé. Les puits se partageaient en quatre parties égales appelées veilles ; une veille était donc le temps fixé pour ceux qui faisaient faction. Elles se marquaient au moyen d’une horloge d’eau nommée clepsydre.

Quatre manipules par légion, deux de princes et deux de hastaires, étaient chargés de la propreté du camp. Les autres manipules fournissaient les gardes du général, des lieutenans, du questeur, et des tribuns. Les triaires n’avaient d’autre emploi que de surveiller les chevaux de la cavalerie auprès de laquelle ils campaient.

Polybe explique de quelle manière le général donnait le mot d’ordre à ses troupes. La dixième turme de cavalerie, et la dixième cohorte d’infanterie étant les dernières dans chaque légion, campaient toujours à la queue du camp, près de la porte nommée, pour cette raison, décumane. On y choisissait un cavalier dans la turme, et trois fantassins pris dans les trois manipules, hastaires, princes et triaires, qui composaient la cohorte ; c’étaient ceux que l’on nommait tesseraires ; ils étaient dispensés de garde et de faction.

Tous les jours, avant le coucher du soleil, ils se rendaient à la tente du tribun de service, et recevaient de lui une petite tablette (tessera) sur laquelle le mot d’ordre était écrit. Ils retournaient aussitôt à la queue du camp, et la mettaient entre les mains du chef de leur ma-