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distributions de butin, les cavaliers reçoivent toujours le triple des fantassins, tandis que les centurions n’ont que le double. Les exactions que ces officiers exercèrent, et l’usage sanguinaire auquel ils prêtèrent leurs bras, sous les empereurs, avilirent encore ce grade militaire, comme il déshonora celui de tribun.

Le cep de vigne était la marque de dignité du centurion : ce bâton fut en usage tant que dura la milice légionnaire. Il fallait que le soldat souffrît avec patience le châtiment ; les lois ne faisaient grâce ni à la révolte, ni à la résistance.

Du temps de la république, lorsque les légions n’étaient pas perpétuelles, les officiers rentraient dans la vie civile, et c’est pour cette raison que nous voyons si souvent le même homme devenir plusieurs fois tribun, centurion, primipile.

Le centurion avait des officiers au-dessous de lui. Chaque capitaine de la tête, dit Polybe, choisissait un capitaine de la queue. Ils tenaient la place des centurions, en cas d’absence ou de maladie. Le dernier officier de la légion, le décurion d’infanterie, commandait dix hommes ou une chambrée.

Il est probable que les turmes étaient distinguées par le rang comme les cohortes, en sorte que la première turme en nombre dans chaque légion, devenait aussi la première en honneur. L’officier qui la commandait exerçait donc au-dessus de toute la cavalerie de la légion la même supériorité que le primipile avait sur l’infanterie.

Dans les siècles heureux de la république, la richesse mettait peu de différence entre les habits des officiers et ceux des soldats ; les généraux distinguaient les leurs par la couleur écarlate et quelques bandes de pourpre. D’ailleurs tout était à-peu-près égal entre ceux qui commandaient et ceux qui obéissaient. Le luxe ne s’établit dans les armées qu’avec peine, et par des progrès insensibles. Il régnait avec insolence à Rome et par tout l’empire, qu’il était encore étranger dans le camp.

L’habillement de guerre nommé sagum était différent de celui que l’on portait à la ville. Lorsque Virginius tenant en main le couteau sanglant qu’il venait de plonger dans le sein de sa fille, pour lui sauver l’honneur, eut regagné le camp avec une escorte nombreuse de citoyens qui l’avaient voulu suivre, Tite-Live fait observer que toutes ces toges répandues dans le camp, produisirent un effet extraordinaire sur l’esprit des soldats. Il leur sembla voir Rome entière soulevée contre Appius.

Dans les alarmes soudaines, les habitans de la ville quittaient la toge et prenaient le sagum pour manifester qu’alors tout citoyen devenait soldat.

La matière de ce vêtement était de laine ; il se portait rouge écarlate pour l’officier, et de couleur rousse pour le soldat.

Sous la cuirasse et le corselet, paraissait une tunique de laine qui descendait jusqu’aux genoux en formant plusieurs plis ; elle était sans ouverture par devant, et assez ample en bas pour ne point gêner les mouvemens. Quintilien, parlant de l’orateur, dit que sa tunique doit descendre devant jusqu’au milieu de la jambe ; c’était la tunique de la ville. Il ajoute que plus longue, elle appartient aux femmes ; et plus courte, aux gens de guerre.

La mollesse s’étant introduite avec le luxe, sous les empereurs, il est fréquemment parlé de tuniques à manches dans les auteurs du siècle d’Auguste. Jusque là, les femmes seules avaient droit de les porter. Le même