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pitaines une fois désignés par les tribuns, les généraux avaient droit de les avancer.

La promotion régulière devait être fort longue. De la dernière centurie des hastaires dans le dixième manipule, les centurions roulaient en remontant les manipules et les centuries, jusqu’à ce qu’ils parvinssent au rang des princes. Le même ordre était observé pour arriver des princes aux triaires, où les centurions passaient de même du dixième manipule au neuvième, au huitième, etc.

La réunion d’un manipule de chacun de ces trois corps formait une cohorte, et la première fut toujours distinguée des autres ; de sorte que les centurions des triaires, des princes et des hastaires dans cette cohorte, étaient les premiers capitaines de la légion. Venaient ensuite les centurions des triaires selon le rang de leurs manipules ; ceux des princes ; et enfin les hastaires.

Lorsque les trois corps ne subsistèrent plus, les six centurions qui commandaient la première cohorte furent toujours regardés comme supérieurs aux autres. Les premiers centurions de chaque cohorte marchaient après eux ; les seconds venaient ensuite selon le rang de leurs cohortes, et ainsi jusqu’aux chefs des sixièmes centuries qui étaient les derniers de la légion. La gradation qui se forme en remontant de ceux-ci jusqu’au primipile, va tracer l’ordre de la promotion.

Toutefois, comme les généraux disposaient des rangs dans leur armée, une progression si longue et si insensible n’était sans doute que le partage de ceux qui, manquant de mérite ou d’occasion de se faire connaître, se traînaient lentement de grade en grade, et sortaient du service avant d’être parvenus aux postes éminens. Les autres franchissaient plusieurs degrés à-la-fois, comme on le voit par ces deux exemples.

Sp. Ligustinus, qui servit dans les guerres de Macédoine, après avoir été deux ans simple soldat, fut fait centurion de hastaires dans le dixième manipule ; c’était le dernier capitaine de la légion. Il paraît ensuite en Espagne en qualité de soldat-volontaire. Caton le nomma premier centurion de hastaires dans la première cohorte. Il servit encore comme soldat volontaire contre Antiochus. Le général de l’armée, M. Acilius Glabrio, lui donna la première centurie des princes dans la première cohorte. Enfin il fut avancé au rang de principile par Tiberius Gracchus. On voit que de dernier centurion d’une légion, Ligustinus monte tout-à-coup dans la première cohorte, et que depuis qu’il y est entré, il n’en sort plus, devenant successivement centurion de hastaires, de princes et de triaires.

L’autre exemple est celui de M. Cæsius Scæva. Il était simple soldat dans la guerre de César contre les Bretons. Une valeur éclatante lui fit donner pour récompense le grade de centurion. Sept ans après, sous Dyrrachium, il était encore dans une huitième cohorte. Des prodiges de bravoure, attestés par son bouclier percé de deux cent trente coups de javelot, lui méritèrent de César le rang de primipile, avec un présent de deux cent mille sesterces.

Les centurions passaient quelquefois de la centurie inférieure d’une légion à la centurie supérieure d’une autre légion. Ils se trouvaient engagés par le serment militaire, ainsi que les soldats, et ne pouvaient sortir du service sans congé. Leur rang était inférieur à celui du simple cavalier, même avant l’établissement de l’ordre équestre. Dans les