Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/675

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
667
POLYBE, LIV. VIII.

aux mains avec les ennemis. Le combat fut quelque temps douteux ; mais ensuite les troupes de Philippe, ne pouvant tenir contre les difficultés du terrain et le nombre des ennemis, cédèrent et se replièrent sur l’infanterie pesamment armée. Alors les assiégeans, comme pour les insulter, marchent en avant, descendent dans la plaine, et livrent combat aux soldats pesamment armés. La garnison de la citadelle s’aperçut que Philippe faisait marcher lentement en arrière ses cohortes les unes après les autres, et, croyant que Philippe battait entièrement en retraite, elle quitta imprudemment son poste, persuadée que sans elle sa situation même le défendait assez. Ces troupes sortent peu à peu de la citadelle, et, par différens défilés, descendent avec impétuosité dans la plaine, où, après la fuite des ennemis, elles espéraient faire quelque butin. Alors celles du côté de Philippe, qui étaient cachées dans des fonds boisés, sortent de leur embuscade et fondent sur la garnison : les soldats pesamment armés reviennent à la charge ; l’épouvante et la confusion se répandent parmi les ennemis. La garnison de Lisse prend la fuite en désordre et se réfugie dans la ville ; mais celle de la citadelle fut coupée par l’embuscade. D’où il arriva, ce que l’on attendait le moins, que Philippe prit la citadelle sans aucun danger ; pour la ville, elle fut attaquée si vivement par les Macédoniens, qu’elle ne put tenir que jusqu’au lendemain. Philippe, devenu le maître de Lisse et de sa citadelle d’une manière si extraordinaire, le devint en même temps de tous les lieux voisins. Entre autres, la plupart des villes d’Illyrie lui ouvrirent d’elles-mêmes leurs portes. Après la prise de ces deux forteresses, on vit bien qu’il n’y en avait plus où l’on pût être à couvert contre ce prince, et que l’on ne pouvait lui résister impunément. (Dom Thuillier.)


V.


Achéus, assiégé dans la citadelle de Sardes, est livré à ses ennemis par la trahison de Bolis, et condamné à une mort honteuse par Antiochus.


Bolis était Crétois de naissance, considéré pendant long-temps à la cour des Ptolémées, et honoré du commandement. Il avait la réputation d’un homme adroit, et d’une grande hardiesse à tout entreprendre, et passait pour n’être inférieur à personne dans l’art de la guerre. Sosibe, se l’étant gagné par des entretiens fréquens et s’en étant fait un ami, lui dit qu’il ne pouvait, dans les circonstances présentes, faire un plaisir plus sensible au roi, que de trouver un moyen de sauver Achéus. Bolis après l’avoir entendu, lui répondit qu’il y penserait, et se retira. Après y avoir bien songé, il alla au bout de deux ou trois jours trouver Sosibe, et lui dit qu’il se chargeait de l’affaire, qu’il avait demeuré quelque temps dans Sardes, qu’il avait une grande connaissance des lieux, et que Cambyle, qui y commandait les Crétois au service d’Antiochus, était non-seulement son concitoyen, mais encore son parent et son ami. Or, Cambyle était chargé de la garde d’un des forts qui sont derrière la citadelle ; car, comme on n’y peut établir aucune fortification, il n’avait pour défense que la troupe de Cambyle. Sosibe fut ravi de cette particularité, et demeura persuadé que, ou bien il était absolument impossible de tirer Achéus du péril où il était, ou que, si cela était possible, nul autre plus que Bolis n’était capable de le faire. Cette chaleur avec laquelle Bolis se chargeait de cette