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POLYBE, LIV. XV.

uns des autres. J’avoue que ce n’est pas ma méthode ordinaire ; j’ai coutume de marquer sous chaque année les événemens qui y sont arrivés : mais j’ai eu des raisons pour m’écarter en cette occasion de mon premier plan. Les voici : Plolémée Philopator, après avoir terminé la guerre qu’il avait entreprise pour la Cœlé-Syrie, passa, de la conduite sage et rangée qui jusqu’alors l’avait fait admirer, à la vie voluptueuse et déréglée que nous venons de voir. Enfin, le mauvais état de ses affaires le jeta dans la guerre dont nous parlerons tout-à-l’heure, et dans laquelle, si on en excepte les cruautés et les injustices réciproques, il ne s’est passé, ni sur terre ni sur mer, rien qui soit digne de mémoire. C’est ce qui m’a fait croire que, sans ranger sous chaque année de petits faits qui ne méritent nulle attention, il valait mieux, et pour ma propre commodité, et pour l’intérêt des lecteurs, que j’assemblasse comme en un corps tout ce qui pouvait faire connaître le caractère et les inclinations de Ptolémée. (Excerpta Vales.) Schweigh.




FRAGMENS
DU

LIVRE QUINZIÈME.


I.


Perfidie des Carthaginois à l’égard des ambassadeurs que Scipion leur avait envoyés. — Retour d’Annibal en Afrique. — Bataille de Zama.


Scipion, touché de l’enlèvement de son convoi et de l’abondance où étaient les ennemis, beaucoup plus touché encore de l’infidélité des Carthaginois qui, contre la religion des sermens et la foi des traités, recommençaient de nouveau la guerre, leur députa L. Émilius, L. Bébius et L. Fabius, pour leur porter ses plaintes et leur apprendre en même temps la nouvelle qu’on lui avait mandée de Rome, que le peuple romain avait ratifié le traité. Les ambassadeurs furent d’abord conduits devant le sénat, et de là devant l’assemblée du peuple. Là et ici ils parlèrent sur les affaires présentes avec beaucoup de force et de liberté. Ils commencèrent par représenter aux Carthaginois ce qu’avaient fait à Tunis les ambassadeurs envoyés de leur part ; qu’en entrant dans le conseil ils ne s’étaient pas contentés d’offrir des libations et d’adorer la Terre, selon l’usage observé chez les autres nations ; qu’ils s’étaient encore prosternés servilement contre terre et avaient baisé les pieds à toute l’assemblée ; que s’étant levés ensuite ils avaient avoué le tort qu’ils avaient eu de violer les traités faits ci-devant entre les Romains et les Carthaginois ; que c’était une perfidie pour laquelle ils se reconnaissaient dignes de toute la vengeance qu’il plairait aux Romains d’en tirer ; que cependant ils priaient, au nom de la Fortune, qu’au lieu de les traiter à la rigueur, on fit de leur infidélité, en la leur pardonnant, un exem-