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POLYBE, LIV. XXIII.

manda à l’ambassadeur de Ptolémée et à ceux qui avaient été envoyés à ce roi par les Achéens, quelle alliance il venait renouveler. Personne n’ayant rien à répondre à cette question, on s’informait les uns des autres ; tout le conseil fut fort embarrassé. La difficulté venait de ce qu’il s’était fait entre les Achéens et Ptolémée plusieurs traités d’alliance qui étaient très-différens les uns des autres, selon les conjonctures où ils avaient été faits, et que l’ambassadeur de Ptolémée, en renouvelant l’alliance, n’avait parlé de renouvellement qu’en général et sans aucune distinction. Les ambassadeurs achéens étaient tombés dans la même faute en prêtant et recevant les sermens accoutumés, comme si jamais il n’y eût eu qu’un traité d’alliance. C’est pourquoi le préteur ayant étalé tous les traités et fait voir en détail les différences importantes qu’il y avait entre eux, la multitude voulut savoir lequel de tous on était venu renouveler. Comme ni Philopœmen, pendant la préture duquel le renouvellement s’était fait, ni Lycortas qui avait été pour cela envoyé à Alexandrie, ne purent rendre raison de leur conduite, ils furent convaincus d’avoir procédé, dans cette affaire, avec trop peu de prudence et de maturité ; au lieu que leur faute fit concevoir une grande idée du mérite d’Aristène, on le regarda comme le seul homme qui sût parler avec connaissance de cause. Il empêcha que le décret ne fût ratifié, et remit la décision à un autre temps.

Après cela, on donna audience aux ambassadeurs de Séleucus. On renouvela l’alliance qu’on avait faite avec lui, mais on ne crut pas devoir accepter pour lors les vaisseaux dont il faisait présent. L’assemblée ensuite se sépara, et chacun se retira dans la ville d’où il était venu. Un autre jour qu’il se célébrait une grande fête, Quintus Cécilius, au retour de Macédoine, où il était allé comme ambassadeur auprès de Philippe, vint dans l’Achaïe. Aristène assembla aussitôt tous les principaux membres de la république dans Argos, et Quintus Cécilius, étant entré dans le conseil, dit que les Achéens devaient d’autant moins user de rigueur avec les Lacédémoniens, que la conduite qu’on avait tenue à leur égard passait les bornes d’une juste modération, et que l’on ferait bien de réformer tout ce qui s’était imprudemment fait contre eux dans cette occasion, à quoi il exhorta les Achéens de tout son pouvoir.

Il parut bien alors que ce qui avait été statué contre les Lacédémoniens n’était pas du goût d’Aristène, et qu’il s’entendait avec Cécilius. Son silence le trahit ; il ne répliqua pas un seul mot. Diophane de Mégalopolis, homme plus guerrier que politique, se leva ensuite. Ce ne fut pas pour défendre ou excuser le procédé des Achéens ; il n’ouvrit pas la bouche sur ce point ; mais pour se venger de Philopœmen, qu’il n’aimait pas, en intentant une autre accusation contre les Achéens. Il dit qu’on avait injustement agi non-seulement avec Lacédémone, mais encore avec Messène. Ce reproche était fondé sur ce que les Messéniens n’étaient d’accord entre eux ni sur le décret qu’avait fait Titus Quintius pour le rappel des exilés, ni sur la manière dont Philopœmen l’avait mis à exécution. Cécilius, se voyant des partisans parmi les Achéens mêmes, trouva encore plus mauvais que tout le conseil ne se soumît pas à son sentiment.

Alors Philopœmen, Lycortas et Archon prirent hautement la défense de la république ; ils firent voir que tout ce qui avait été fait au sujet de Sparte, avait été sagement fait, et même à l’a-

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