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POLYBE, LIV. XXXI.

Sur ce rapport, le roi fit partir pour Rome Coman et Ptolémée son frère, avec Mérula, et leur donna ordre de porter des plaintes au sénat contre l’injustice que lui faisait le roi d’Égypte, et le peu d’égards qu’il avait pour le peuple romain. Ces députés, dans leur route, renvoyèrent aussi Titus, qui n’avait pu non plus rien gagner. Telle était la situation des affaires à Alexandrie et dans la Cyrénaïque. (Ibid.)


V.


Au mépris des traités qu’il avait faits, des paroles qu’il avait données, Antiochus porta la guerre chez Ptolémée, ne prouvant que trop bien la vérité de ce mot de Simonide, — Il est difficile d’être homme de bien. — Avoir du penchant au bien, et s’en donner jusqu’à un certain point les dehors, c’est chose aisée ; mais y tendre de toutes les forces de sa volonté et avec persévérance sans rien mettre au-dessus de la justice et de l’honneur, voilà qui est moins facile à exécuter.


Dans un complot, ce n’est pas celui qui dénonce ses complices par crainte ou découragement que nous regardons comme un homme de bien, mais celui qui supporte les conséquences et la punition de la révélation sans en être cause. Quant à celui qui, sous l’influence d’une peur secrète, place sous les yeux du maître les fautes des autres, et qui rétablit pour ainsi dire des faits que le temps eût enveloppés de ses voiles, comment un tel homme aimerait-il des historiens ?


Toujours les malheurs qui surpassent notre attente nous font oublier de moindres malheurs.

Ne voit-on pas aussi l’incertitude et l’inconstance de la fortune dans les circonstances où un homme qui croit édifier pour soi, n’édifie que pour ses ennemis ? comme Persée, qui élève des colonnes, et n’a pas le temps de les achever ; Lucius Émilius les termine et y place ses statues.

Il convient au même génie d’ordonner savamment un combat et un festin, d’être le vainqueur du banquet, et de se montrer tacticien habile devant l’ennemi.


Ce fut bien, selon le proverbe, prendre le loup par les oreilles, que de prendre Lemnos et Délos. Les différends des Athéniens avec Délos leur donnèrent bien du tourment, et quant à Haliarte, ils en tirèrent plus d’ennui que d’avantage.

Les habitans de Péra sont semblables à des esclaves tirés inopinément des fers qui, pleins de confiance pour le présent, s’agitent sans relâche, et ne croiraient pas comprendre pourquoi on les a délivrés, s’il ne faisaient quelque chose d’extraordinaire et d’opposé à ce que font les autres.

Plus les Romains paraissaient acharnés après Eumène, plus les Grecs redoublaient envers lui d’égards, par suite de ce sentiment naturel aux hommes qui les porte à favoriser celui qu’on opprime. (Angelo Mai et Jacobus Geel.)



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