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César.

gau, vingt-trois mille du pays de Bâle, et trente-six mille des environs de Dutlingen. Dans toute cette troupe, qui montait en tout à trois cent soixante-huit mille hommes, il y avait quatre vingt-douze mille combattans. César ayant fait faire le dénombrement de ceux qui retournèrent, il ne s’en trouva que cent dix mille.

30. Cette guerre des Suisses étant ainsi terminée, les principaux de presque toute la Gaule celtique vinrent en féliciter César. Ils lui dirent que, quoiqu’il n’eût pas entrepris cette guerre pour leur vengeance particulière, mais pour celle du peuple romain, la défaite de ces peuples leur était pourtant aussi avantageuse qu’à lui ; que les Suisses, quoique leurs affaires fussent dans un état florissant n’avaient quitté leur pays que pour venir s’emparer du leur, et, après avoir pris le meilleur, rendre le reste tributaire. Ils lui demandèrent permission d’assembler les états de toute la Gaule parce que d’un commun accord ils avaient une prière à lui faire. César y ayant consenti, ils prirent entre eux jour pour s’assembler, et jurèrent de n’en parler à personne que du consentement de tous.

31. Après la clôture de leur assemblée les mêmes députés revinrent lui demander une audience particulière, parce qu’ils avaient, disaient-ils, à lui proposer des choses qui intéressaient le bien général, et qui requéraient un fort grand secret. L’ayant obtenue, ils se jettent à ses pieds en pleurant et lui disent que, dans cette occasion, son secret leur était aussi nécessaire que son secours, parce que, si ce qu’ils avaient à lui communiquer était découvert, ils couraient risque d’être perdus. Divitiacus, qui portait la parole, lui représenta que la Gaule celtique était divisée en deux factions ; que les Auvergnats étaient à la tête de l’une et les Autunois à la tête de l’autre ; qu’après s’être long-temps disputé la souveraineté, les Auvergnats, unis aux Francs-Comtois, avaient fait venir les Allemands à leur secours ; que d’abord il en avait passé dans la Gaule environ quinze mille, qui, ayant reconnu la bonté du pays, y en avaient attiré tant d’autres, qu’ils étaient bien à présent cent vingt mille ; que ceux d’Autun et leurs alliés dans deux batailles contre eux avaient perdu leur cavalerie, leur noblesse et leur sénat ; qu’accablés de tant de pertes, ils avaient été obligés de donner les principaux d’entre eux en otage aux Francs-Comtois, avec serment de ne les jamais redemander, et de ne jamais recourir au peuple romain pour se soustraire à leur domination ; que du rang qu’ils tenaient auparavant dans les Gaules par leur valeur et leur alliance avec les Romains, il ne leur restait qu’une soumission à un dur esclavage ; qu’il était le seul qui n’eût pu se résoudre à prêter ce serment et à donner ses enfans en otage, et que pour cette raison, il avait été contraint d’abandonner le pays, pour venir implorer le secours du sénat, parce qu’il ne s’était pas lié comme les autres ; mais que l’état des Francs-Comtois était à présent plus triste que celui des Autunois, puisque Arioviste, roi des Allemands, s’était établi dans la Franche-Comté, le meilleur canton de la Gaule celtique dont il tenait le tiers, et en voulait encore vouloir un autre tiers pour ceux de Constance, qui, depuis peu, étaient venus le joindre au nombre de vingt-quatre mille ; que si l’on n’y donnait ordre, bientôt tous les Allemands passeraient le Rhin, inonderaient la Gaule et en chasseraient les habitans, parce que le terrain en était bien meilleur que le leur et la façon de vivre beaucoup