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l’empereur léon.


vent orner celui qui est revêtu d’une dignité si éminente.


INSTITUTION II.

Des qualités du général.

Nous voulons qu’un chef d’armée soit continent, sobre, vigilant, frugal et tempérant dans tous ses besoins, laborieux et assidu aux affaires, circonspect et prudent ; qu’il méprise l’argent et n’ambitionne que la gloire. Il ne faut pas qu’il soit trop jeune ni d’un âge trop avancé. Il doit parler en public avec facilité lorsqu’il est nécessaire. Il est bon, si cela se trouve, qu’il ait des enfans. Il ne doit s’adonner à aucune espèce de lucre et de trafic ; mais il faut qu’il ait l’âme élevée et au-dessus des petites choses ; qu’il soit enfin généreux, magnanime, et, autant qu’il sera possible, sain et robuste.

Sans la continence, un général entraîné par son penchant aux voluptés négligerait le soin des choses nécessaires : par la sobriété et la tempérance, il prendra un empire absolu sur les sens qui nous portent à toutes sortes d’appétits déréglés quand on s’en laisse gouverner.

S’il aimait à dormir, il ne pourrait soutenir les veilles dans les grandes et importantes affaires, la nuit étant le temps le plus propre pour les méditer, parce que l’esprit est plus recueilli et plus en état de prendre son parti.

S’il est simple et modeste dans la dépense de sa maison et le nombre de ses domestiques, il ne dissipera point, par un faste frivole, des sommes d’argent qui doivent être employées utilement pour les expéditions.

Sa patience à supporter la peine sera pour les soldats un exemple qui les encouragea. Il serait indécent qu’il pensât a son repos avant d’avoir assuré celui des autres.

La sagacité de l’esprit et la prudence lui serviront tout prévoir et à prendre sur-le-champ sa résolution dans les incidens inopinés qui demandent un prompt secours.

On sera convaincu qu’il méprisera l’argent quand il ne se laissera point corrompre, qu’il gouvernera les affaires noblement et sans autre but que l’honneur de les faire réussir. Combien n’y a-t-il pas de gens capables de montrer du courage devant l’ennemi, qui n’auraient pas la force de résister à l’attrait de l’or : c’est un moyen bien puissant pour tenter la cupidité ; il n’est point d’armes plus terribles pour vaincre un général et le déshonorer.

Il ne doit être ni jeune ni vieux, parce que la jeunesse est inconstante et sans lumières, et que la vieillesse, débile manque de force pour agir : l’une, trop fougueuse, se précipite inconsidérément dans le danger ; l’autre, pesante et tardive, peut nuire aux affaires par sa lenteur : il est donc à propos de le choisir d’un moyen âge, où le corps n’a rien perdu de sa vigueur et où l’esprit est parvenu à sa maturité. Ces deux choses devant s’aider mutuellement c’est en vain qu’on admire l’une si elle est dénuée du secours de l’autre.

Un général affectionné des troupes les gouvernera facilement et en sera bien mieux aidé elles obéiront sans contrainte et ne se refuseront à aucun péril. Telle est la force de ce sentiment, qu’on prodigue volontiers sa vie pour celui qu’on aime.

Celui qui a des enfans doit être préféré, sans que nous rejetions cependant l’autre, s’il est capable. Le premier se livre avec plus d’ardeur aux affaires pour l’intérêt de sa famille : s’il