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cinquante mille protêts. Les grandes villes industrielles réclamèrent. Rien.

La mine ainsi chargée, l’Assemblée s’ajourna au 20 mars après avoir obligé M. Thiers à lui affirmer qu’elle pourrait délibérer à Versailles « sans craindre les pavés de l’émeute ». Le petit homme avait lui aussi son échéance.

Devant toutes ces menaces, Paris ne reculait pas. Picard, essayant de la peur, appela Courty, lui dit que « les membres du Comité Central jouaient leur tête ». Courty fit une quasi-promesse de rendre les canons. Le Comité désavoua Courty.

Depuis le 6 il siégeait à la Corderie, tout à fait indépendant des trois simulacres de groupes. Il fit preuve de politique, déjoua les intrigues d’un certain Raoul du Bisson, ancien officier d’armées exotiques chargé d’aventures douteuses, qui avait présidé la réunion du 24 au Vauxhall et travaillait à constituer un Comité Central par en haut, avec les chefs de bataillon. Le Comité dépêcha trois délégués à ce groupe qui fit une résistance fort vive. Un chef de bataillon, Barberet, se montrait particulièrement intraitable ; un autre, Faltot, entraîna la réunion : « Moi, je vais au peuple ! » La fusion était conclue le 10, jour de l’assemblée générale des délégués. Le Comité présenta son rapport, racontant l’histoire de la semaine, la nomination d’Aurelles, l’incident Courty : « Ce que nous sommes, les événements l’ont fait ; les attaques réitérées d’une presse hostile à la démocratie nous l’ont appris ; les menaces du Gouvernement sont venues le confirmer : nous sommes la barrière inexorable élevée contre toute tentative de renversement de la République. » Les délégués furent invités à presser les élections au Comité Central. On rédigea ensuite un appel à l’armée.

Depuis plusieurs jours, le Gouvernement renvoyait en province les 220 000 hommes désarmés par la capitulation, mobiles ou libérables pour la plupart, et les remplaçait par des soldats des armées de la Loire et du Nord. Paris s’inquiétait de ces troupes que les journaux réactionnaires excitaient contre lui. L’appel de la réunion leur disait : « Soldats, enfants du peuple, unissons-nous pour sauver la République. Les rois et les empe-