Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/138

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lomnié Paris et ameuté contre lui la province… voulu nous imposer un général… tenté de nous désarmer… dit à Paris : Tu viens de te montrer héroïque ; nous avons peur de toi, donc nous t’arrachons ta couronne de capitale… Qu’a fait le Comité Central pour répondre à ces attaques ? Il a fondé la Fédération, prêché la modération, la générosité… Un des plus grands sujets de colère contre nous est l’obscurité de nos noms. Hélas ! bien des noms étaient connus, très connus, et cette notoriété nous a été bien fatale… La notoriété s’obtient à bon marché : quelques phrases creuses ou un peu de lâcheté suffit : un passé tout récent l’a prouvé… Dès que nous voici arrivés au but, nous disons au peuple qui nous a assez estimé pour écouter nos avis qui ont souvent froissé son impatience : Voici le mandat que tu nous as confié : là où notre intérêt personnel commencerait, notre devoir finit ; fais ta volonté. Mon maître, tu t’es fait libre. Obscurs il y a quelques jours, nous allons rentrer obscurs dans tes rangs et montrer aux gouvernants que l’on peut descendre, la tête haute les marches de ton Hôtel-de-Ville, avec la certitude de trouver au bas l’étreinte de ta loyale et robuste main. »

À côté de cette adresse d’une vibration si neuve, les représentants et les maires affichèrent quelques lignes sèches et pâles où ils s’engageaient à demander, à l’Assemblée, l’élection de tous les chefs de la garde nationale et l’établissement d’un conseil municipal.

À Versailles, ils trouvèrent une ville d’affolés. Les fonctionnaires arrivés de Paris, terrorisés, répandaient la terreur. On annonçait cinq ou six insurrections en province. La coalition était consternée. Paris vainqueur, le Gouvernement en fuite, ce n’était guère ce qu’on s’était promis. Et ces conspirateurs projetés par la mine qu’ils avaient bourrée et allumée, criaient à la conspiration, parlaient de se réfugier à Bourges. Picard avait bien télégraphié à la province : « L’armée au nombre de quarante mille hommes s’est concentrée à Versailles, » on ne voyait pour toute armée que des hordes — c’est le mot de Jules Simon — ne saluant plus les officiers, les regardant d’un air menaçant ; des soldats déclaraient en pleine rue qu’ils ne se battraient pas contre