Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/222

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dont il a travesti l’histoire dans ces filandreuses périodes sentimentales par où il masquait la sécheresse de son cœur, Louis Blanc écrivit le 8 au nom de ses collègues : « Pas un membre de la majorité n’a encore mis en question les principes républicains… Quant à ceux qui sont dans l’insurrection, nous leur disons qu’ils auraient dû frémir à la seule pensée d’aggraver, de prolonger le fléau de l’occupation étrangère en y ajoutant le fléau des discordes civiles ».

Ce que M. Thiers répéta mot pour mot aux premiers conciliateurs qui lui vinrent, les délégués de l’Union syndicale : « Que l’insurrection désarme d’abord, l’Assemblée ne peut désarmer. — Mais Paris veut la République. — La République existe ; sur mon honneur, moi au pouvoir, elle ne succombera pas. — Paris veut des franchises municipales. — La Chambre prépare une loi les accordant à toutes les communes. Paris n’aura ni plus ni moins. » Les délégués lurent un projet de transaction qui parlait d’amnistie générale, de suspension d’armes. M. Thiers laissa lire, ne contesta formellement aucun article, et les délégués revinrent à Paris, convaincus qu’ils avaient découvert une base d’arrangement.

Ils sortaient à peine que M. Thiers courait à l’Assemblée. Elle venait de reconnaître à toutes les communes le droit d’élire leur maire. M. Thiers monta à la tribune, demanda que ce droit fût restreint aux villes de moins de vingt mille âmes. On lui cria : « C’est voté. » Il persista, soutint que dans une République on doit d’autant plus armer le pouvoir que l’ordre y est plus difficile à maintenir », menaça de donner sa démission, força l’Assemblée à revenir sur son vote.

Le 10, la Ligue des droits de Paris emboucha la trompette : « Que le gouvernement renonce à poursuivre les faits accomplis le 18 mars… Que l’on procède à la réélection générale de la Commune. Si le gouvernement de Versailles restait sourd à ces revendications légitimes, qu’il le sache bien, Paris tout entier se lèverait pour les défendre. » Le lendemain, ses délégués allèrent à Versailles. M. Thiers reprit son refrain : « Que Paris désarme, » et ne voulut entendre parler ni d’armistice, ni d’amnistie. « Grâce sera faite, dit-il, à ceux qui