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d’heure, sous peine d’être passés par les armes. Ils ne répondirent pas. Les Versaillais n’osèrent pas s’aventurer.

À cinq heures, Cluseret et La Cécilia arrivèrent à Issy avec quelques compagnies ramassées à la hâte. Elles se déployèrent en tirailleurs ; à huit heures, les fédérés rentrèrent dans le fort. Sous la porte d’entrée, un enfant, Dufour, auprès d’une brouette remplie de cartouches et de gargousses, était prêt à se faire sauter, croyant entraîner la voûte avec lui. Dans la soirée, Vermorel et Trinquet amenèrent d’autres renforts et les fédérés réoccupèrent toutes les positions.

Aux premiers bruits d’évacuation, des gardes nationaux étaient venus à l’Hôtel-de-Ville interpeller la Commission exécutive. Elle affirma n’avoir donné aucun ordre d’évacuer le fort et promit de punir les traîtres, s’il y en avait. Le soir, elle arrêta Cluseret à son arrivée du fort d’Issy. Il quitta le ministère laissant une situation militaire plus mauvaise qu’à son entrée ; l’armée d’opération qu’il avait promise n’était pas réunie, l’armement ni l’équipement n’avaient progressé ; il y avait moins d’hommes sous les armes et Issy était compromis. Toute sa défense intérieure avait été d’enterrer, au Trocadéro, des canons qui, disait-il, faisaient brèche au Mont-Valérien. Plus tard, il devait rejeter son incapacité sur ses collègues, les traitant d’imbéciles, de vaniteux, accusant Delescluze de fourberie, disant que son arrestation avait tout perdu, s’appelant modestement « l’incarnation du peuple [1] ».

Cette panique d’Issy fit le Comité de salut public. Le 28 avril, à la fin de la séance, Jules Miot, une des plus belles barbes de 48, s’était levé pour demander « sans phrases » la création d’un Comité de salut public ayant autorité sur toutes les commissions et capable de « faire tomber la tête des traîtres. » Comme on le pressait d’indiquer ses raisons, il répondit solennellement qu’ « il croyait ce Comité nécessaire. » Tout le monde

  1. Appendice XI.