Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/266

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était d’accord pour fortifier le contrôle et l’action, la seconde Commission exécutive s’étant montrée aussi impuissante que la première ; mais que signifiait ce mot de Comité de salut public, parodie du passé, épouvantail à nigauds ? Il hurlait dans cette révolution prolétarienne, dans cet Hôtel-de-Ville d’où le Comité de salut public fit arracher Jacques Roux, Chaumette et les meilleurs amis du peuple. Malheureusement, la plupart au Conseil n’avaient lu l’histoire de la Révolution qu’avec le pouce. Ce titre ronflant les enleva. Ils auraient voté séance tenante, sans l’énergie de quelques collègues qui exigèrent une discussion. « Oui, disaient ces derniers, nous voulons une Commission vigoureuse, mais qu’on ne fasse pas du pastiche révolutionnaire. Que la Commune se réforme ; qu’elle cesse d’être un petit parlement bavard, brisant le lendemain, au caprice de sa fantaisie, ce qu’il a créé la veille. » Et ils proposaient un Comité exécutif. Les voix s’équilibrèrent.

L’affaire d’Issy départagea l’assemblée. Le 1er  mai, 34 voix contre 28 enlevèrent le titre. Sur l’ensemble du projet, 45 votèrent pour et 23 contre. Plusieurs avaient voté pour, malgré le titre, dans le but unique de créer un pouvoir fort. Beaucoup motivèrent leur vote. Les uns prétendirent obéir au mandat impératif de leurs électeurs. Ceux-ci voulaient faire « trembler les lâches et les traîtres. » D’autres déclaraient tout simplement, comme Miot, que c’était une mesure indispensable. » Félix Pyat qui avait poussé Miot et soutenu violemment la proposition pour conserver l’estime des criards, avança cette puissante raison : « Pour, attendu que le mot de salut public est absolument de la même époque que les mots de République française et de Commune de Paris. » Mais Tridon : — « Contre, parce que je n’aime pas les défroques inutiles et ridicules. » Vermorel : — « Contre ; ce n’est qu’un mot, et le peuple s’est trop longtemps payé de mots. » Longuet : — « Ne croyant pas plus aux mots sauveurs qu’aux talismans et aux amulettes, je vote contre. » Vallès : — « Au nom du salut public, je m’abstiens et je proteste. » — Dix-Sept déclarèrent collectivement voter contre l’institution d’un Comité qui créerait une dictature, et plusieurs autres invoquèrent le même motif, très puéril. La Com-