Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/34

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

un relieur qui avait réuni dix mille francs en quelques jours pour les grévistes de Genève. Nouvelles poursuites. Varlin présente la défense ; cette fois, le ton a monté : « Une classe qui a été l’opprimée de toutes les époques et de tous les règnes, la classe du travail, prétend apporter un élément de régénération… Un vent de liberté absolue peut seul épurer cette atmosphère chargée d’iniquités… Lorsqu’une classe a perdu la supériorité morale qui la fait prédominante, elle doit s’effacer si elle ne veut pas être cruelle, parce que la cruauté est la seule ressource des pouvoirs qui tombent. » Trois mois de prison, tel est le jugement, « pour avoir affirmé l’existence, la vitalité et l’action de l’Association internationale en intervenant dans la grève récente des ouvriers de Genève, soit moralement, soit en encourageant la lutte entre patrons et ouvriers », et dissolution encore du bureau de Paris.

Il n’en fut pas moins représenté en septembre, à Bruxelles, au troisième congrès de l’Internationale qui invita tous les travailleurs à s’opposer à une guerre entre la France et l’Allemagne. La majorité vota, malgré Tolain, la propriété collective ; le gouvernement impérial en joua pour effrayer des républicains qui l’inquiétaient sérieusement.

Le 2 novembre 68, jour des Morts, au cimetière Montmartre, ils découvrent sous une pierre moisie la tombe du représentant Baudin tué le 2 décembre 51 au faubourg Saint-Antoine. Quentin, rédacteur du Réveil, invective l’Empire. Dans la foule, on crie : Vive la République ! Un qui s’intitule « Peuple et Jeunesse » parle de vengeance et la promet prochaine. Le Réveil, de Delescluze, l’Avenir national, de Peyrat, la Revue politique, de Challemel-Lacour, d’autres journaux gagnés par l’exemple, ouvrent une souscription pour donner à Baudin une tombe qui le rappelle. Berryer même souscrit. L’Empire traduit devant son tribunal les journalistes et les orateurs du 2 novembre. Un jeune avocat défend Delescluze. Totalement inconnu du public, il marque depuis quelques années pour la jeunesse des écoles et du barreau où il a surpris des maîtres dans un procès bizarre dit des 54. Il ne s’attarde pas à glorifier Baudin. Du premier bond, Gambetta s’attaque