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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

militaire où les prisonniers furent remis à Gallifîet. Il leur laissa la vie. À Versailles, une foule acharnée cribla de pierres la voiture jusqu’à la prison des Chantiers. Les bonapartistes du conseil de guerre visèrent l’auteur de la Lanterne. Merlin défendit le prince Pierre Bonaparte. Trochu, que Rochefort avait appelé à décharge, renia dédaigneusement son ancien collègue. Gambetta eut l’âme autrement haute et lui donna un très éloquent défenseur.

Blanqui vint ensuite. Le Comité de salut public avait mis à la disposition de ses amis cinquante mille francs pour le faire évader du fort du Taureau. Il aurait fallu davantage et, avant tout, des agents adroits, car ordre était donné de le tuer à la moindre tentative d’évasion. Une partie des fonds était dans la caisse du Comité le jour de l’entrée des Versaillais.

Que savait de la Commune, Blanqui, arrêté avant le 18 Mars ? Rien, même par les journaux qui ne lui parvenaient pas. On le condamna pour le 31 Octobre, surtout parce qu’il était, depuis 1830, l’insurgé. Ce grand Hamlet révolutionnaire, jeté malgré lui à la cime de vagues qu’il ne gouverna jamais, mal compris de ses fanatiques, expiant des fautes qu’il ne commettait pas, marcha sa noble et longue vie sur les épines que le bronze de Dalou a immortalisé sous ses pieds.

Le journalisme révolutionnaire eut des victimes. Le jeune Maroteau, pour deux articles du Salut Public, fut condamné à mort. Au bagne, Henri Brissac, secrétaire du Comité du salut public ; au bagne, Alphonse Humbert qui avait demandé dans le Père Duchesne l’arrestation de Chaudey ; les publicistes arrêtés plus tard, Henry Maret, Lepelletier, Peyrouton, etc., en eurent pour des années de prison, ceux qui purent gagner l’étranger, pour neuf années d’exil. Quel était leur crime ? D’avoir défendu la Commune. Pour avoir défendu Versailles, la Commune s’était contenté de supprimer les journaux. Au fond, les conseils avaient ordre d’exterminer le parti révolutionnaire.

La peur de l’avenir les rendit implacables. Après les fusillades sans nombre de la rue des Rosiers, ils voulurent, eux aussi, sacrifier aux mânes de Lecomte et de Clément Thomas. Les vrais exécuteurs étaient