Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/222

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jambes s’agitent comme celles d’un homme atteint de la danse de Saint-Guy ; il râle ; il va mourir dans un instant.

» Sur une autre voiture est étendu un prisonnier qui a voulu s’échapper ; il porte au cou une large plaie béante ; sa tête chauve balance sur sa poitrine, comme si elle était à demi détachée du tronc. C’est horrible à voir.

» Une cantinière, assise sur la première banquette, insulte à la foule en la menaçant du poing ; ce poing est ensanglanté et a perdu plusieurs doigts dans la lutte de la barricade : un rouge coup de sabre lui traverse la figure. " Un dernier peloton de chasseurs ferme la marche, et le hideux cortége va rejoindre le premier.

» On entend un bruit de tambours lointain : une poussière blanche s’élève à l’horizon : c’est un nouveau convoi de prisonniers qu’on nous amène. »

Les honnêtes gens de Versailles couraient comme à une fête au devant de ces chaînes sans fin. Et les dames du meilleur monde ne dédaignaient pas de donner du bout de leurs ombrelles dans le flanc de quelques fédérés. Escortés par les risées et les imprécations de cette populace gantée, ces malheureux traver-