Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/554

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Partout où la civilisation putréfiée de l’Asie vient à être touchée par le souffle frais de l’Europe, elle tombe en poussière, et l’Europe se verra tôt ou tard dans la nécessité de prendre l’Asie entière sous sa tutelle comme déjà l’Angleterre s’est chargée de l’Inde. Dans tout ce pêle-mêle de territoires et de populations, il ne se trouve pas une seule nationalité digne ou capable de durée et de régénération. La complète dissolution des nations asiatiques paraît donc inévitable, et une régénération de l’Asie ne semble possible qu’au moyen d’une infusion de vie européenne, par l’introduction graduelle du christianisme, de nos mœurs et de notre culture, par l’immigration européenne, par la tutelle des gouvernements européens.

Quand nous réfléchissons sur la marche que pourra prendre cette renaissance, une circonstance nous frappe tout d’abord, c’est que la plus grande partie de l’Orient est abondamment pourvue de richesses naturelles, qu’elle peut produire pour les nations manufacturières de l’Europe des quantités considérables de matières brutes et de denrées alimentaires, particulièrement de denrées de la zone torride, et ouvrir ainsi aux produits de leurs fabriques un marché immense. C’est là une indication de la nature, que cette renaissance, comme la culture des peuples barbares en général, doit s’opérer par la voie du libre échange des produits agricoles contre les produits manufacturés ; c’est pourquoi les nations européennes devraient commencer par admettre ce principe qu’aucune d’entre elles ne doit obtenir de privilège commercial dans une partie quelconque de l’Asie, qu’aucune ne doit être favorisée de préférence aux autres[1]. Afin de développer ce commerce, il conviendrait d’ériger les principales places de l’Orient en villes libres, ou la population européenne aurait le

  1. Ce principe a reçu une consécration éclatante par l’ouverture du Céleste-Empire au commerce de toutes les nations, soit que l’un doive faire honneur de ce résultat à la libéralité des négociateurs anglais ou à prudence des mandarins chinois, et enfin à l’une ou à l’autre en même temps. (H. R.)