Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/70

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cevoir le principe de la division du travail mieux que l’école ne l’a expliqué, et à comprendre comment il est applicable à des nations entières. Mais je n’avais fait connaître que très-imparfaitement ma pensée, et j’acquis si peu de gloire par mes consciencieux efforts, que le Conversations-Lexicon, pendant mon absence de l’Allemagne, ne craignit pas de représenter sous le jour le plus défavorable toute ma conduite, comme agent de la Société de commerce allemande, et même de soutenir que je m’étais paré des dépouilles d’autrui.

Depuis, j’ai parcouru l’Autriche, l’Allemagne du Nord, la Hongrie et la Suisse, la France et l’Angleterre, et j’ai cherché partout à m’instruire par l’étude de l’état social ainsi que par des lectures. Ma destinée m’ayant ensuite conduit aux États-Unis, je laissai là tous les livres ; ils n’auraient pu que m’égarer. Le meilleur livre sur l’économie politique qu’on puisse lire dans cette contrée nouvelle, c’est la vie. On y voit des solitudes se changer en riches et puissants États. C’est là seulement que je me suis fait une idée nette du développement graduel de l’économie des peuples. Un progrès qui, en Europe, a exigé une suite de siècles, s’accomplit là sous nos yeux ; on y voit les sociétés passer de l’état sauvage à l’élève du bétail, de cette dernière condition à l’agriculture, et de l’agriculture aux manufactures et au commerce. C’est là qu’on peut observer comment la rente de la terre s’élève peu à peu de zéro à un chiffre considérable. Là, le simple paysan connaît mieux que les savants les plus perspicaces de l’ancien monde, les moyens de faire prospérer l’agriculture et d’augmenter la rente ; il s’efforce d’attirer des manufacturiers, des fabricants dans son voisinage. Là, les contrastes entre les pays agricoles et les pays de manufactures se produisent de la manière la plus tranchée et occasionnent les plus violentes convulsions. Nulle part on n’apprécie mieux les voies de communication et leur influence sur la vie morale et matérielle des peuples. Ce livre, je l’ai lu avidement et assidûment, et les leçons que j’y ai puisées, j’ai essayé de les coordonner avec les résultats de mes études, de mes expériences et de mes ré-