Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/145

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moins accessibles que d’autres aux mauvaises tentations, le grand-monde et le beau-monde portent la responsabilité de celles qui les dévorent ou les suffoquent derrière les lourdes portières capitonnées. Quand donc ces privilégiés de la nature oublient leur droit de monter jusque chez le maître des cieux, il est juste qu’on ne les condamne pas toujours sans condamner aussi ceux qui, ne sachant point les écouter quand ils font entendre les voix d’un monde meilleur, se contentent d’exploiter leur talent sans respect pour leur inspiration !

A la cour on est trop distrait pour toujours suivre la pensée de l’artiste et le vol du poète ; trop occupé pour se souvenir de leur bien-être et des besoins de leur position sociale, (chose pardonnable après tout et qui se conçoit) ; on les exploite donc sans merci ni remords, au profit du plaisir, de l’ostentation, de la gloire. Cependant, il vient un moment, on ne sait quand, où la distraction cessant, l’occupation cédant, chacun y comprend le poète et l’artiste comme nul ne le comprend ailleurs ; où le souverain le récompense comme nul ne pourrait le faire ailleurs, et cet instant, qui a lui pour quelques-uns, brille désormais aux yeux de tous comme un phare, une étoile polaire, que chacun croit devoir luire pour lui aussi ! Ce qui n’est pas. Chez les parvenus qui s’empressent de payer leurs vanités satisfaites, ne se sentant grands que par l’argent qu’ils dépensent, on a beau écouter de toutes ses oreilles,