Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/257

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passé, où il ne revoyait que fascination ineffable, passion du même coup sans limites et sans voix, grâce à la fois hautaine et prodigue, donnant toujours ce qui nourrit l’âme, ce qui trempe la volonté ; ne souffrant jamais ce qui amollit la volonté et énerve l’âme. Retenue plus éloquente que toutes les humaines paroles, en cet air où l’on respire du feu, mais un feu qui anime et purifie sous les moites infiltrations de la vertu, de l’honneur, du bon-goût, de l’élégance des êtres et des choses ! Comme Van Dyck, Chopin ne pouvait aimer qu’une femme d’une sphère supérieure. Mais, moins heureux que le peintre si distingué de l’aristocratie la plus distinguée du monde, il s’attacha à une supériorité qui n’était pas celle qu’il lui fallait. Il ne rencontra point la jeune fille grande-dame, heureuse de se voir immortalisée par un chef d’œuvre que les siècles admirent, comme Van Dyck immortalisa la blonde et suave anglaise dont la belle âme avait reconnu qu’en lui, la noblesse du génie était plus haute que celle du pedigree !

Longtemps Chopin se tint comme à distance des célébrités les plus recherchées à Paris ; leur bruyant cortége le troublait. De son côté, il inspirait moins de curiosité qu’elles, son caractère et ses habitudes ayant plus d’originalité véritable que d’excentricité apparente. Le malheur voulut qu’il fut un jour arrêté par le charme engourdissant d’un regard, qui le voyant voler si haut, si haut, le fixa… et le fit tomber dans ses rets ! On les croyait alors de l’or le plus fin,