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force calme et réfléchie, un sentiment de ferme détermination joint à une gravité cérémonieuse qui, dit-on, était l’apanage de ses grands hommes d’autrefois. L’on croit y revoir les antiques polonais, tels que nous les dépeignent leurs chroniques : d’une organisation massive, d’une intelligence déliée, d’une piété profonde et touchante quoique sensée, d’un courage indomptable, mêlé à une galanterie qui n’abandonne les enfans de la Pologne ni sur le champ de bataille, ni la veille, ni le lendemain du combat. Cette galanterie était tellement inhérente à leur nature, que malgré la compression que des habitudes rapprochées de celles de leurs voisins et ennemis, les infidèles de Stamboul, leur faisaient exercer jadis sur les femmes, en les refoulant dans la vie domestique et en les tenant toujours à l’ombre d’une tutelle légale, elle a su néanmoins glorifier et immortaliser dans leurs annales, des reines qui furent des saintes, des vassales qui devinrent des reines, de belles sujettes pour lesquelles les uns risquèrent, les autres perdirent des trônes, aussi bien qu’une terrible Sforza, une intrigante d’Arquien, une Gonzague coquette.

Chez les polonais des temps passés, une mâle résolution s’unissant à cette ardente dévotion pour les objets de leur amour qui, en face des étendards du croissant aussi nombreux que les épis d’un champ, dictait tous les matins à Sobieski les plus tendres billets-doux à sa femme, prenait une teinte singulière et imposante dans