Page:Littérature Contemporaine - Volume 42, 1889.djvu/61

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— « Eh ! quoi, dit-elle, tu n’aurais en partage que le silence et l’oubli, toi qui fus le père de nos troubadours, le maître de cette gaie science de poésie et d’amour qui fait la gloire de notre belle patrie !… Non, Clémence fera retentir pour toi les louanges si chères au poète. Ma demeure s’ouvrira comme un palais pour les fils de la lyre. C’est en ton honneur qu’ils diront leurs chansons d’amour ou de guerre. Et toi, ajouta-t-elle, en se penchant sur l’humble fleur qui parait la tombe ignorée, douce fleur de pensée, emblème de souvenir et de constance deviens la fleur des Troubadours et des trouvères ! Celui qui mieux aura chanté la vaillance ou l’amour fidèle, recevra des mains d’Isaure une violette d’or. »

C’est ainsi que la légende, dans son langage imagé et fleuri, se plaît à raconter les circonstances qui donnèrent naissance à l’institution des jeux floraux, dont le lustre séculaire est dû en réalité à la belle et douce Clémence.

Elle en fut d’abord la reine et, d’après la loi d’amour, y occupa le trône de beauté. Elle eut ainsi à couronner de ses belles mains les vainqueurs de ces luttes poétiques, et entr’autres, Antoinette de Villeneuve, son intime amie, pour une touchante pastorale. Car, à son exemple, les plus nobles dames de Toulouse se firent un honneur de se faire inscrire pour figurer dans ces tournois lyriques, dont les annales rappellent encore le nom vague et doux de cette merveilleuse Paule de Viguier, qui est demeurée célèbre par ses charmes sous le nom de la belle Paule. Aussi, depuis lors, la Fête des fleurs s’ouvre Chaque année par l’éloge de Clémence Isaure, prononcé par un des mainteneurs du gai savoir.

Qu’il nous soit permis d’ajouter, dans le sonnet suivant, un fleuron à sa couronne toujours nouvelle :

Quel songe d’or tombé de l’écrin du sommeil,
Pourrait, riche de grâce et de magnificence,