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ZINZIN


Zinzin fut une négation.

À sa mère d’après la chair, il put en opposer une d’après le désir. Lamprido ne connut jamais sa femme que d’après la méthode ancestrale de bon papa. Une Picarde lui ouvrit, toutes grandes, les portes de la science qu’elle tenait de maître Nicolas Chorier. C’est ainsi que Lamprido aboutit à opposer, au non énergique de son épouse, un oui catégorique. Et au milieu de la ruine qu’affirmait, d’un vaste rococo, la mort — Zinzin fut engendré, négativement, et comme de Lamprido un crachat humoristique.

Le temps de grossesse, la mère fut gloutonne comme une louve. Lamprido chanta, pendant les neuf mois, un chœur novénaire d’humanitaire sentimentalité.

Ce fut le temps où l’autosuggestion aboutit à l’auto-destruction. Le vrai était devenu vraisemblable. À la forêt, les feux brûlèrent des nuages ; les bûcherons construisirent des étoiles. Un bruit de bombe fora, par intervalles, un trou dans le calme. Le silence de la maison tint des colloques contradictoires au silence de l’espace.

Au terme de la portée, la science médicale pronostiqua un avorton ou quelque chose s’en rapprochant. À l’accouchement, ils furent quatre à tirer. D’après le témoignage authentique des assistants, Zinzin ressemblait, en dimensions, à une tête d’éléphant.

Lamprido s’extasia devant son œuvre et fit « l’Apologie de la paresse ». Et pour en éloigner définitivement les moindres maléfices du vulgaire, il lui découvrit, comme parrain, une jeune mixture d’israélite, et, comme marraine, une petite actrice, les deux, en leur domaine réciproque, à dispositions appréciables.