Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/99

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assez, et si avoit l’ueil bien vif et legier. Et moult y ot de paroles, et, toutes voies, quant vint au departir elle fust bien apperte ; car elle me pria II foiz ou III, que je ne demouraisse point à elle venir veoir, comment que ce fust ; si me tins moult acointes d’elle, qui en si pou de heure fu si son acointe que oncques mais ne l’avoye veue, et si savoit bien que l’en parloit de mariage d’elle et de moy. Et quant nous fumes partis, mon seigneur de père me dist : « Que te samble de celle que tu as veue. Dy m’en ton avis ». Si lui dis et respondis : « Mon seigneur, elle me samble belle et bonne, maiz je ne luy seray jà plus de près que je suis, si vous plaist », si luy dis ce qu’il me sambloit d’elle et de son estre. Et ainsi je ne l’eus pas, et pour la très grant legière manière et la trop grant appertise qui me sembloit à veoir en elle ; dont je en merciay depuis Dieu moult de foiz ; car ne demoura pas an et demi qu’elle fust blasmée, mais je ne sçay se ce fut à tort ou à droit ; et depuis mourust.

Et pour tant, mes chières filles et nobles pucelles, toutes gentilz femmes de bon lieu venues doivent estre de doulces manières, humbles et fermes d’estat et de manières, poy emparlées, et respondre courtoisement et n’estre pas trop enresnées, ne surseillies, ne regarder trop legierement. Car, pour en faire moins, n’en vient se bien non ; car maintes en ont perdu leur mariage pour trop grans semblans, dont par maintes foiz l’en esperoit en elles autres choses qu’elles ne pensoient.