Page:Loisy - L'évangile et l'église, 1904.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

L’Évangile tout entier était lié à une conception du monde et de l’histoire qui n’est plus la nôtre, et c’est l’Evangile tout entier, non seulement sa prétendue essence, qui n’y était pas lié « inséparablement [1] ». La preuve de cette assertion n’est pas à chercher dans une possibilité abstraite, mais dans les faits : puisque l’Evangile s’est détaché peu à peu de ses formes originelles, il est permis d’affirmer que celles-ci étaient passagères, et que l’Evangile n’était pas inséparablement associé aux conceptions dont ces formes portaient la marque. Du reste, on ne peut pas dire de la foi au Dieu Père, plus que de l’espérance du règne de justice, quelle est « sans époque, comme l’homme [2] ». L’homme n’est pas sans époque ; il est de toutes les époques, et il change plus ou moins avec elles. L’Evangile n’a pas été adressé à l’homme abstrait, sans époque, immuable, et qui n’a jamais existé que dans l’esprit des théoriciens, mais à des hommes réels, qui se sont succédé dans le temps et auxquels il ne pouvait manquer

  1. P. 94
  2. Ibid.