Page:Loisy - L'évangile et l'église, 1904.djvu/215

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hellénique. La théologie savante d’Origène était la synthèse doctrinale qui devait faire accepter le christianisme aux esprits les plus cultivés. C’était le pont jeté entre la nouvelle religion et la science de l’antiquité. Jamais le monde grec ne se serait laissé circoncire, et jamais non plus il ne se serait converti au Messie d’Israël ; mais il pouvait se convertir et il se convertit au Dieu fait homme, au Verbe incarné. Tout le développement du dogme trinitaire et christologique, qui, d’après M. Harnack et d’autres théologiens critiques, pèserait si lourdement sur toutes les orthodoxies chrétiennes, en les rivant à une doctrine surannée, à la science de Platon et d’Aristote, depuis longtemps dépassée par la science moderne, fut, à son origine, une manifestation vitale, un grand effort de foi et d’intelligence, qui permit à l’Église d’associer ensemble sa propre tradition et la science du temps, de fortifier l’une par l’autre, de les transformer en une théologie savante qui croyait contenir la science du monde et la science de Dieu. La philosophie pouvait se faire chrétienne sans être obligée de se renier elle-même, et pourtant le christianisme n’avait pas cessé d’être une religion, la religion du Christ.