Page:Loix et constitutions des colonies franc̜oises de l’Amérique sous le vent - 1704-1721.djvu/430

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de V Amérique sous le Vent. 41^

Je vous avoue que j’ai été très-étonné d’apprendre une pareille chose de votre part, et je suis persuadé que vous ne vous y êtes déterminé que parce que vous avez cru pouvoir sans injustice, exiger ce droit qui s’est introduit par un mauvais usage que le Roi a toujours désapprouvé. Pour que vous ne tombiez plus à l’avenir dans le même cas , il est nécessaire que je vous explique de quelle manière l’usage de prendre des Nègres de choix s’est introduit aux Isles, et dans quel cas Sa Majesté l’a désapprouvé et défendu*

Dans les premiers temps qu’on a commencé d’introduire des Nègres aux Isles, les Négocians y faisoient un bénéfice si considérable, que de leur propre mouvement, et pour s’attirer la bienveillance des Gouverneurs et des principaux Chefs , ils leur faisoient des présens de quelques Noirs par proportion à l’importance des emplois. La délicatesse de quelques-uns ne leur permettant pas de recevoir de pareils présens, détermina les Négocians de prendre une voie plus honnête ; ils offrirent pour cela de certain nombre de Nègres un choix au prix de 300 liv. pièce quoiqu’ils en valussent davantage : cela étoit alors volontaire, les Négocians l’établissoient eux-mêmes, et il n’y avoit rien à dire ; mais dans les suites la plupart de ceux qui ont introduit des Nègres aux Isles # bien loin de faire les profits qu’ils faisoient dans les premiers temps # ayant au contraire, en plusieurs occasions fait des pertes considérables, soit par la mortalité des Nègres ou autres accidens arrivés dans le cours de leurs voyages, ils ne crurent pas devoir . donner ées Nègres de choix à un prix modique ; la cupidité de ceux qui avoient en main l’autorité ne s’étant point accommodée de ce retranchement , obligea ces Négocians de continuer la même gratification, et de s’arroger le choix comme un droit qui ne devoit pas être contesté ; ensorte que ce qui n’étoit d’abord que volontaire devint alors forcé, et ’tourna dans la suite en usage : Sa Majesté en reçut en différais temps des plaintes ; et comme cela parut une vexation tres-grande et préjudiciable au Commerce, elle ordonna que ceux qui avoient pris des Nègres de choix de leur autorité les payeroient sur le pied de leur juste valeur au prix des Marchands ; ce qui fut exécuté. Sa Majesté se détermina dans la suite de défendre très-étroitement cet usage, comme étant très-injuste et contraire à ses intentions : Elle ne désapprouvera pourtant pas que lorsqu’il arrivera aux Isles des Vaisseaux Négriers qui auront fait un bon voyage, que les Chefs reçoivent des Capitaines des Nègres de choix à Pordina re, lorsqu’ils voudront Ses donner volontairement à 300 liv. pièce ; pliais elle ne veut point que cela soit forcé, n’étant pas juste ; et je vous