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BELLIOU-LA-FUMÉE

VIII

Ce soir-là, dès que la Fumée prit sa place habituelle, le croupier arrêta le jeu.

« Le jeu est fermé, déclara-t-il. Ordre du patron. »

Mais les patrons réunis là n’étaient pas d’humeur à se laisser déjouer. En quelques minutes ils eurent constitué un fonds commun, chacun y mettant mille dollars, et ils s’installèrent à la table.

« Allez-y ! Écrasez-nous, cria Harvey Moran d’un ton de défi, au moment où le croupier lançait la bille dans son premier tour de valse.

— Donnez-moi le maximum de vingt-cinq, suggéra la Fumée.

— Entendu : marchez ! »

La Fumée plaça immédiatement vingt-cinq jetons sur le double-zéro, et gagna. Moran s’épongea le front.

« Continuez, dit-il, nous avons dix mille dollars en banque. »

Au bout d’une heure et demie les dix mille dollars appartenaient à la Fumée.

« La banque a sauté, annonça le croupier.

— En avez-vous assez ? » demanda la Fumée.

Les propriétaires des jeux se regardaient, terrifiés. Eux, les gras favoris de la souveraine chance, ils étaient supplantés. Ils se heurtaient à quelqu’un qui avait une connaissance plus intime de ces lois, ou qui en invoquait d’autres plus puissantes et inconnues.

« Nous abandonnons la partie, dit Moran. N’est-ce pas, Burke ? »