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BELLIOU-LA-FUMÉE

miracle, leur imposant un regain de force, il les obligea à le ramener au niveau de son gigantesque rival.

Devant eux apparut la porte ouverte du bureau de l’Enregistrement. Les deux hommes firent un effort final et inutile. Aucun ne put se décoller de l’autre : côte à côte ils trébuchèrent sur le seuil, entrèrent violemment en collision et tombèrent la tête en avant.

Ils se mirent sur leur séant, trop épuisés pour se relever. Le gros Olaf, ruisselant de sueur, respirant en halètements effroyablement pénibles, esquissait dans l’air des gestes décousus et essayait en vain de parler. À la fin il tendit la main avec une intention bien évidente ; la Fumée la lui serra cordialement.

« C’est une course au pair, déclara le préposé de l’Enregistrement. » La Fumée entendait comme en rêve cette voix qui sonnait affaiblie et lointaine. « Tout ce que je puis dire, c’est que vous êtes tous deux gagnants. Il faudra vous partager la concession. Vous voilà associés. »

Leurs mains unies exécutèrent un mouvement de pompe pour ratifier cette décision. Le gros Olaf secoua la tête avec une grande énergie et bredouilla quelque temps avant de pouvoir s’exprimer.

« Satané Chéchaquo ! proféra-t-il, mais avec une note d’admiration dans la voix. Je ne sais pas comment vous avez fait, mais ça y est. »

Au-dehors était massée une foule bruyante, et le bureau même était envahi et bondé. Les deux associés se décidèrent à une nouvelle tentative, et s’aidèrent mutuellement à se remettre sur pied. La Fumée sentait ses jambes trembler sous lui et titubait comme un ivrogne. Le gros Olaf s’approcha en chancelant.