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BELLIOU-LA-FUMÉE

et demi par jour. Cela paraissait facile… sur le papier. Jean Belliou, qui devait demeurer au camp et faire la cuisine, ne pourrait fournir qu’un portage occasionnel : il restait donc pour chacun des trois jeunes hommes huit cents livres à transporter de quinze cent mètres par jour. En faisant des ballots de cinquante livres, cela représentait pour eux une balade quotidienne de vingt-cinq kilomètres en charge et vingt-quatre à vide, puisque, comme l’expliqua Kit enchanté de cette découverte, « ils n’avaient pas à revenir la dernière fois » ; avec des ballots de quatre-vingts livres, la promenade serait de trente kilomètres par jour, et de vingt-quatre seulement avec des ballots de cent livres. « Comme je n’aime pas à marcher, déclara Kit, je porterai cent livres. » — Ayant saisi sur le visage de son oncle un sourire de scepticisme, il s’empressa d’ajouter : « Naturellement j’y arriverai peu à peu. Un débutant doit se mettre au courant des manœuvres et des trucs. Je prendrai cinquante livres pour commencer. »

Il fit comme il disait, et s’engagea gaiement sur la piste. Il laissa tomber le sac à l’emplacement choisi pour le prochain campement, et revint à la même allure. C’était plus facile qu’il ne l’avait cru. Cependant ces trois kilomètres avaient éraflé son vernis de force, et sa mollesse commençait à transparaître.

Son second ballot fut de soixante-cinq livres. C’était plus dur. Plusieurs fois il s’assit par terre, selon la coutume de tous les porteurs, en appuyant sa charge sur un rocher ou un tronc d’arbre. Au troisième voyage il devint téméraire. Il attacha ses courroies à un sac de haricots de quatre-vingt-quinze livres et se mit en route. Au bout de cent mètres il sentit qu’il allait s’écrouler. Il s’assit et s’épongea le visage.