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Page:London - Belliou la fumée, trad. Postif, 1941.djvu/64

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BELLIOU-LA-FUMÉE

créature, dont les yeux bleus étaient humides de reconnaissance. Breck lui-même voulait donner à Kit un billet de cinquante dollars, qu’il essaya ensuite de passer au Courtaud.

« Étranger, déclara celui-ci, je viens dans ce pays pour tirer de l’argent de la terre et non de mes semblables. »

Breck farfouilla dans son bateau et en sortit une dame-jeanne de whisky. Le Courtaud fit un geste du bras pour la prendre, puis se ravisa et secoua la tête.

« Il y a encore ce maudit Cheval blanc à franchir plus bas, et on le dit pire que la Boîte. Je ne tiens pas à tenter la foudre. »

Ils accostèrent à plusieurs kilomètres en aval, et tous les quatre allèrent examiner le passage dangereux. À cet endroit le fleuve, composé d’une série de rapides, rencontrait un écueil qui le déviait vers la rive droite. Toute la masse d’eau se précipitait de côté vers l’étroite issue, accélérait furieusement sa vitesse et se soulevait en vagues énormes, blanches et courroucées. C’était la Crinière du Cheval blanc, à bon droit redoutée, car ici la mort prélevait un tribut encore plus lourd. D’un côté de cette crête, l’eau s’engouffrait en tire-bouchon dans un entonnoir, et de l’autre côté s’y creusait le grand tourbillon. Pour passer entre les deux, il fallait monter sur la Crinière même.

« Celui-ci dame le pion à la Boîte », conclut le Courtaud.

Pendant qu’ils observaient ce spectacle, une embarcation se présenta à la tête des rapides. C’était un grand bateau, long d’au moins dix mètres, chargé de plusieurs tonnes d’équipement et manœuvré par