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BELLIOU-LA-FUMÉE

six hommes. Bien avant d’atteindre la Crinière, il se mit à plonger et à rebondir, presque caché à intervalles par l’écume et les embruns.

Le Courtaud jeta un long regard du côté de Kit, et lui dit :

« Il fait bien de la fumée, et il n’en est pas encore au point le plus dur. Ils ont rentré les avirons. Maintenant il entre dedans. Bon Dieu ! il a disparu. Non, le voilà ! »

Si grand que fût le canot, il avait semblé submergé dans les vapeurs fuyantes entre les vagues. Il reparut l’instant d’après au sommet d’une crête, au plus épais de la Crinière. Kit fut abasourdi de voir la quille du bateau se profiler nettement dans toute sa longueur. Pendant une fraction de seconde, la barque se tint en l’air, tous les rameurs immobiles à leur poste, sauf l’homme, celui du gouvernail. Puis le bateau replongea dans le bouillon et disparut de nouveau. Trois fois il rebondit et s’enfonça, puis ceux qui étaient sur la rive le virent piquer du nez dans le tourbillon et s’écarter de la Crinière. Le timonier, après s’être épuisé en vains efforts sur la barre, céda au courant et aida le bateau à décrire le grand cercle.

Trois fois il accomplit le tour, repassant si près du rocher où se tenaient Kit et le Courtaud, qu’ils auraient pu sauter à bord. L’homme de la barre les salua de la main. La seule issue possible du tourbillon était par la Crinière : la barque y entra obliquement à son extrémité supérieure. Sans doute par crainte de n’avoir pas encore échappé à l’attraction giratoire, le timonier ne redressa pas assez vite la course du bateau. Quand il essaya de le faire, il était trop tard. Alternativement soulevée en l’air et submergée, l’em-