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Page:London - Contes des mers du Sud, trad. Postif et Gruyer, 1948.djvu/68

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Ou, du moins, le capitaine Oudouse se battait. Je l’entendis crier :

« Fiche le camp de là, païen noir, sale vermine ! »

En même temps, je le vis allonger au Canaque un solide coup de pied.

Or, le capitaine Oudouse avait perdu tous ses vêtements, sauf ses souliers. Et ceux-ci étaient de lourds brodequins ferrés.

Le coup porté fut cruel, car il atteignit le païen en plein sur la bouche et sur le menton.

Je m’attendais à voir l’homme riposter du poing. Aux trois quarts estourbi, il se contenta de nager à quelque dix pieds autour de l’écoutille, qu’il ne pouvait se résigner à abandonner, mais dont il n’osait s’approcher davantage.

Chaque fois qu’un paquet de mer le repoussait plus avant, le capitaine Oudouse, se maintenant des mains à son radeau, lançait au pauvre diable une ruade, simple ou double, selon les cas, en criant :

« Tiens, païen noir ! Prends cela pour toi ! ». Indigné, je hurlai à mon tour, à l’adresse du blanc :

« Je ne sais qui me retient, espèce de brute, d’aller te tomber dessus et de te jeter à l’eau. »

Si réellement je ne le fis pas, c’est que j’étais trop harassé pour réussir l’opération.

Je criai donc au Canaque de venir vers moi et je lui offris la moitié de mon panneau.

Il me déclara s’appeler Otoo, natif de Bora-Bora, une des îles du groupe de Tahiti, la plus occidentale de l’archipel.