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Page:London - Croc-Blanc, 1923.djvu/267

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sur lesquelles les dieux n’étendaient pas leur protection, comme ils faisaient sur les bêtes apprivoisées. Il était permis aux chiens d’en faire leur proie.

Toutes ces lois étaient infiniment complexes, leur observance exacte était souvent difficile et l’inextricable écheveau de la civilisation, qui refrénait constamment ses impulsions naturelles, bouleversait Croc-Blanc.

Trottant derrière la voiture, il suivait son maître à San José, qui était la ville la plus proche. Là se trouvaient des boutiques de boucher, où la viande pendait sans défense. À cette viande il était interdit de toucher. Beaucoup de gens s’arrêtaient en le voyant, l’examinaient avec curiosité et, ce qui était le pire, le caressaient. Tous ces périlleux contacts de mains inconnues, il devait les subir. Après quoi les gens s’en allaient, comme satisfaits de leur propre audace.

Parfois, certains petits garçons, sur les routes avoisinant Sierra Vista, se faisaient un jeu, quand il passait, de lui lancer des pierres. Il savait qu’il ne lui était pas permis de les poursuivre ; mais l’idée de justice qui était en lui souffrait de cette contrainte. Un jour, le maître sauta hors de la voiture, son fouet en main, et administra une correction aux petits garçons, qui désormais n’assaillirent plus Croc-Blanc avec leurs cailloux. Croc-Blanc en fut fort satisfait.

Trois chiens qui, sur la route de San José, rôdaient toujours à ses carrefours, autour des bars, avaient pris l’habitude de bondir sur lui dès qu’ils l’apercevaient. Il supportait cet assaut, en se con-