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Page:London - En pays lointain.djvu/166

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LE DIEU DE SES PÈRES

Voilà l’œuvre de la bonne mère l’Église, que j’aime comme un fils !

Mais écoute bien ceci. C’est une preuve de la bizarrerie des femmes, qu’aucun homme ne peut comprendre. Son père tomba de sa selle et les chevaux qui galopaient derrière le piétinèrent. Ma jeune femme et moi fûmes témoins de la scène, qui se serait effacée aisément de mon esprit si elle n’avait hanté, par la suite, celui de ma compagne. Dans la paix du soir, après cette journée de la chasse à l’homme, la vision se dressa entre nous ; de même dans le silence des nuits, quand nous étions allongés sous les étoiles et que nos âmes n’auraient dû faire qu’une, l’hallucination ne nous quittait pas. Ma femme n’en parlait jamais, mais le fantôme venait s’asseoir à notre foyer, se plaçant sans cesse entre nous. Lorsqu’elle cherchait à l’éloigner, il se dressait alors de toute sa hauteur et s’imposait à un tel point que je parvenais à le sentir moi-même dans le regard apeuré de sa fille et dans le rythme même de sa respiration.

À la fin, elle me donna une fille et mourut. Je revins alors parmi le peuple de ma mère pour que l’enfant pût grandir entourée d’affection. Mais hélas, mes mains étaient rougies du sang des hommes — écoute-moi bien — par la faute de l’Église. Les cavaliers du Nord se mirent à ma recherche, mais