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Page:London - Le Cabaret de la dernière chance, 1974.djvu/187

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pêcheurs. Charley Le Grant me sauta au cou. Sa femme Lizzie me pressa sur sa vaste poitrine. Puis Biîly Murphy. Joe Lloyd et tous les survivants de la vieille garde m’entourèrent et me serrèrent dans leurs bras. Charley empoigna la cruche et se dirigea vers le bar de Jorgensen, de l’autre côté de la voie ferrée, pour chercher de la bière. Préférant du whisky, je lui criai de m’en rapporter une bouteille.

Bien des fois, au cours de la journée, cette bouteille fit le voyage aller et retour. Mes anciens amis de l’époque libre et insouciante arrivèrent plus nombreux, des pêcheurs grecs, russes et français. À tour de rôle ils offrirent et renouvelèrent des tournées générales. Ils s’en allaient, d’autres les remplaçaient ; moi, je restais et trinquais avec tout le monde. Je pintais sans arrêt, et ma béatitude croissait à mesure que les lubies me montaient au cerveau.

Le Peigne, qui m’avait précédé dans son association avec Nelson, apparut, plus magnifique que jamais, mais aussi plus agité, à demi fou et consumé par l’alcool. Il sortait d’une rixe avec son nouveau compagnon sur le sloop Gazelle ; des couteaux avaient été tirés, des coups échangés, et il cherchait à décupler ses rancunes dans le whisky.

La conversation roula sur Nelson et ses larges épaules, maintenant étendues sous la terre de Bénicia, où il dormait son dernier sommeil. Ne voyant que ses qualités, nous versions des larmes à sa mémoire, et pendant ce temps la bouteille ne faisait que se remplir et se vider.

Ils me priaient de rester avec eux, mais par la porte ouverte, je pouvais voir le vent agiter les