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Page:London - Le Cabaret de la dernière chance, 1974.djvu/203

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trouva moyen d’en tirer un peu d’argent en les revendant de porte en porte, et j’engageai le frac pour cinq dollars. On pourrait sans doute le retrouver dans la boutique du prêteur, car je ne l’ai jamais racheté.

Je ne parvenais toujours pas à obtenir du travail. Et pourtant, quelle superbe affaire je représentais aux yeux des employeurs ! J’avais vingt-deux ans, je pesais, déshabillé, cent soixante-cinq livres, et chaque livre pouvait fournir une somme excellente de labeur. Les derniers vestiges du scorbut disparaissaient grâce à un traitement qui consistait à mâcher des pommes de terre crues.

Je frappai à toutes les portes. Je me présentai comme modèle, mais les jeunes gens bien bâtis sans travail encombraient le marché. Je répondis aux annonces de vieux invalides qui recherchaient quelqu’un pour les soigner. Je faillis devenir agent d’une compagnie de machines à coudre, payé à la commission, c’est-à-dire sans aucun fixe. Mais les pauvres ne songent pas, pendant les crises de chômage, à acheter des machines à coudre, en sorte que je dus renoncer à cet emploi.

Je tâchai, entre autres préoccupations frivoles, de trouver de l’embauche comme débardeur et homme de peine. Mais à l’approche de l’hiver l’excédent de l’armée du travail se déversait dans les villes. Et moi qui m’étais contenté jusqu’ici de promener mon insouciance dans les pays du monde et le royaume de l’esprit, j’avais négligé de m’inscrire dans un syndicat.

Je dus me contenter de petits boulots. Je travaillais des journées, des demi-journées, à