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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/102

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LE LOUP DES MERS

en l’honneur du Nap, jeu magnifique, allumèrent chacun un cigare, puis se mirent à battre et à distribuer les cartes.

Ils jouaient pour de l’argent, montant les enjeux à chaque partie, et buvant toujours du whisky. Si bien que je dus apporter une autre bouteille.

J’ignore si Loup Larsen trichait — chose dont il était parfaitement capable — ou non. Mais il gagnait régulièrement.

Le coq faisait des voyages répétés à sa couchette pour aller chercher de l’argent. Chaque fois, il accomplissait le trajet avec une crânerie croissante, mais il ne rapportait avec lui que quelques dollars.

La tête commençait à lui tourner, sous l’effet de la boisson. C’est à peine s’il pouvait encore distinguer les cartes et se tenir droit sur sa chaise. Il se faisait aussi plus familier.

En préambule à l’un de ses voyages, il pointa son index graisseux sur une des boutonnières de la veste de Loup Larsen et, d’un air fanfaron, il proclamait et répétait :

— J’ai de l’argent… Beaucoup d’argent en réserve… Je suis le fils d’un gentleman, je vous l’ai dit…

La boisson n’avait aucune prise sur Loup Larsen. Il buvait pourtant autant que son adversaire. Souvent même son verre était le plus plein. Il demeurait impassible et n’avait même pas un sourire, aux sottises que débitait le coq.

Enfin, avec de véhémentes protestations qu’il

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